Plus elliptique encore que lors de sa première saison, la série de David Simon marque un retour fracassant. L’on n’attendait sincèrement rien de moins du show HBO qui poursuit d’exposer sa science policière, criminelle, d’une manière systématiquement tournée vers le docu-fiction. Si l’on délaisse majoritairement les tours de Franklin Terrace pour s’orienter vers le port de Baltimore, les dockers et leur syndicat, la pègre de l’Europe de l’est, des Balkans, le propos est sensiblement similaire à celui de la saison initiale, soit la constitution d’une petite cellule policière privilégiant les écoutes et en chasse de trafiquants et meurtriers dans le collimateur d’un pontife de la police locale. L’attention des enquêteurs, sensiblement les mêmes que précédemment, s’oriente vers la contrebande, les trafics itinérants au port de fret de la ville, monument post industrielle en voie d’extinction.
Hormis cette nouvelle incursion au cœur d’une enquête complexe, retors, elliptique, David Simon nous entraîne d’avantage encore profondément à l’intérieur de la cicatrice laissée par l’industrie massive sur la société d’une ville maintenant devenue à la limite de l’incontrôlable. Baltimore, haut fleuron de l’industrialisation des Etats-Unis est une laissée pour compte ou évoluent les criminels, les opportunistes et des politiciens nombrilistes. Nous faisons alors connaissance avec des dockers, leur représentant syndical, personnalité de la communauté polonaise de la ville et en froid avec un commandant de police issu de la même nationalité. Un conflit d’estime entre deux immigrés permet à la police de s’intéresser d’avantage aux pratiques usuelles du port, déboulant sur la mise à jour d’un vaste trafic en tous genres. Aussi intéressante que novatrice, cette seconde saison, sans doute moins rythmée que la première, amène du grain au moulin en faisant du trafic non pas une cible prioritaire mais le facteur nécessaire à l’expansion d’une société pour laquelle l’argent est la seule bouée de secours.
Si dans un premier temps, l’amertume d’avoir dû quitter les cités de l’ouest de la ville prédomine, le nouveau contexte prend une forme on ne peut plus saisissante. Ajoutons à cela le fait que les carrières criminelles de Stringer Bell, Barcksdale, Omar Little et j’en passe ne sont pas terminées, les évènements narrés durant cette seconde session ayant pour but l’introduction d’une troisième saison annoncée meilleure encore. Oui, si l’impression première est que David Simon a couper les ponts avec l’univers de la saison précédente, il n’en n’est rien. Non seulement, les personnages y relatifs évoluent mais l’affaire principale, celle du port, est indissociable du trafic dans les rues de la ville. L’on remonte en somme la filière, une filière d’approvisionnement en perpétuelle évolution, sans compter sur l’accord passé entre les deux boss des quartiers de la ville pour assurer la quantité et la qualité du produit vendu. Imparable.
L’on retrouve donc nos inspecteurs McNulty, Greggs, Freamon, Moreland, Daniels, Carver, Herc et toute la fine équipe à laquelle l’on peut ajouter Amy Adams en policière du conté. L’intégralité du casting est impeccable et l’on se permet le luxe d’y incorporer de nombreux personnages dont l’excellent Frank Sobotka. Audacieux, astucieux, drôlement bien écrit, ce deuxième chapitre de sur écoute laissera sans doute sur leurs faims les aficionados des séries policières rythmées mais plongera dans le bonheur les fidèles des élucubration documentées de David Simon. L’arrivée de Dennis Lehane à l’écriture du scénario dès la saison suivante permet encore de nombreuses réjouissances. Superbe. 18/20