"Tapie", comme "Dallas" et son univers impitoyable, emmène son personnage patronyme dans les méandres de la vie publique mouvementée et de la sphère privée, tout autant, de B.Tapie "Ewing", le pétrole en moins, l'envie de réussite et l'audace en plus. Il y a dans le personnage publique comme dans le personnage de la série un capital sympathie évident et fascinant, l'emploi du mot "personnage" à son encontre mystifie déjà la personne qu'il est et a souhaité apparaître. Il attire la lumière, attise les passions. Le duo T.Séguéla & O.Demangel réussit pleinement leur exercice de mise en abîme d'un Bernard Tapie humain, excessif, sensible, battant, battu, pourri. Romançant ses réussites comme ses échecs, les scénaristes-réalisateurs utilisent adroitement quelques aspects de sa biographie, facilités peut-être par un scénario d'une vie réelle comme écrite pour une fiction. Les deux très bons premiers épisodes prennent le temps de décrire les premiers pas dans les affaires et les combines, la sphère familiale et amoureuse, avec un F.Luchini irrésistible. S'en suivent des épisodes inégaux, parfois trop rapides, qui accélèrent le temps, condensent les évènements et auraient mérité davantage qu'on s'y attarde. Et arrive le dernier épisode, excellent, où la série se permet une séquence de plus de 20 minutes, lunaire, auteuriste, par un dialogue entre Tapie et le procureur De Montgolfier, un arrêt sur image sublime et rare d'un dialogue surréaliste et de 2 interprétations ravageuses. Cette série est aussi un voyage dans le temps des années 80 à 2000, ses aspects politiques et sociaux, avec un beau travail de reconstitution. Mais "Tapie" ne serait pas aussi christique s'il n'était pas interprété par un acteur qui possède cette même intensité: L.Lafitte y est aussi charismatique, son mimétisme se mêle à une décontraction bluffante. A ses côtés, le rôle de Dominique Tapie (joliment interprétée par J.Japy) apporte une fraicheur et un recul sur le personnage, tout en se révélant comme la pierre angulaire de l'homme dans ses aspects publiques, professionnels et privés. Dommage donc que cette intensité soit un peu décousue au fil des épisodes, et que la première partie soit un peu trop complaisante. Mais cela ne retire en rien la qualité de l'entreprise, qui au contraire de celles de B.Tapie, ne prennent jamais l'eau. Même si parfois romancée, la série "Tapie" ne renonce jamais à décrire la double facette de l'homme et ses ambiguïtés.