J'attendais cette série avec beaucoup d'impatience. Même si les critiques sont majoritairement négatives vis-à-vis de cette nouvelle production Netflix made in France, on ne peut que féliciter son audace et son originalité. C'est vrai, drôle d'uchronie que celle-ci : se servir des préludes de la Révolution française comme toile de fond afin de dévier vers un récit fantastique où une mystérieuse maladie, le "sang bleu", se propage parmi la noblesse. Et en plaçant l'oeuvre dans notre contexte actuel, le parallèle est pour le moins... troublant : un virus inconnu qui décime la population, qui éveille l'esprit contestataire et rebelle du peuple et qui interroge sur le pouvoir des dirigeants politiques.
Ce qui saute aux yeux quand on démarre "La Révolution", divisée en huit épisodes, c'est sa réussite formelle. L'esthétique, par le biais des décors, des costumes, des maquillages et de la photographie, est savamment conçue. Une atmosphère trouble et poisseuse est plantée, intelligemment fabriquée et peaufinée en détails. Les couleurs y sont splendides. J'ai particulièrement aimé l'origine de la conception du Bleu Blanc Rouge du drapeau français, prôné pour la première fois par le peuple. L'immersion en l'an 1787 est grandiose, accompagnée par une bande sonore électronique ingénieuse et prenante. Bref, ils ont sorti la grosse artillerie pour en mettre plein les yeux, et ça nous donne envie d'y croire. Bien que la série se serve de faits historiques sans prétendre les reconstituer, on embarque aisément dans ce concept étonnant où l'horreur gagne du terrain d'épisode en épisode. Cependant, il ne faut pas s'attendre à une série historique à la "The Crown", à des twists à la "Game of Thrones", ni même à un survival gore à la "Walking Dead" au risque d'être fortement déçu. Ici, l'intérêt est ailleurs. Je dirai même, le défi est ailleurs !
Car si "La Révolution" est visuellement à couper le souffle, elle ne vient pas bouleverser le monde des séries par son fond. Le scénario a beaucoup de mal à nous accrocher et souffre de nombreux temps morts. Le premier épisode, par exemple, est le plus décevant et galère à mettre la machine en route en exposant ses nombreux personnages, tout en profilant les enjeux. Une fois les présentations faites, on tente comme on peut de vibrer face à cette intrigue qui manque cruellement de maitrise. Les dialogues sont très mal écrit et foutraques, et les déjà-vu s'enchainent lorsqu'on est adepte du genre. Toutes ces maladresses, sauvé par des images à la hauteur, laissent alors le casting s'enfoncer dans des interprétations inégales, souvent dénuées d'intensité. On a parfois même l'impression que ça ne joue pas par moment. Composé essentiellement d'inconnus, j'ai néanmoins apprécié l'idée d'une distribution polyethnique, n'en déplaise à certain pour la reconstitution... Quelques rôles féminins, et leurs interprètes, se démarquent au fil de la saison, attisant ainsi notre intérêt. La toute jeune Amélia Lacquemant est bluffante de sincérité, tout comme Coline Beal et Marilou Aussilloux pour leurs nuances et leur investissement physique respectifs. Car oui, s'il y a bien une qualité à reconnaitre à cette intrigue lacunaire, ce sont les valeurs féministes qui s'en dégagent. Le rôle du gros méchant aka Julien Frison, par contre, est un raté complet, et suscite plus le rire que l'effroi. La faute revient encore une fois à des dialogues et des situations loufoques et peu crédibles pour une série de cet acabit. Heureusement, Laurent Lucas, seule tête connue du cast, arrive à se dépatouiller dans ce foutoir.
Les créateurs Gaïa Guasti et Aurélien Molas, plein de bonnes intentions, se sont sans doute risqués à un trop gros morceaux, trop ambitieux et attendus pour répondre aux attentes exigeantes d'un public désormais accoutumé à des productions décevantes made in Netflix. Si la réinvention de l'Histoire est peu convaincante, la série, elle, reste belle à regarder.