L’idée de la série est venue à Virginie Brac suite à la lecture du"Quai de Ouiestreham", récit autobiographique de la journaliste Florence Aubenas paru en 2010. L’ouvrage l’inspire notamment à créer des personnages féminins en situation précaire, en ajoutant le trafic des migrants comme toile de fond. Néanmoins, la créatrice ne voulait pas aborder ces sujets de manière naturaliste ou sinistre, à l’instar de Years and Years, qu’elle cite comme référence. "Par certains côtés, la série est drôle. Il y a des situations du quotidien qui sont triviales, voire baroques. On parle de la crise migratoire, de cette détresse humaine, de la misère. C'est un sujet en arrière-plan, mais la série n'est pas centrée sur ça. On a fait très attention à ne pas faire du Ken Loach ! C’est un cinéaste que j’admire énormément, mais je cherchais une dynamique différente, plus joyeuse, plus explosive.", a-t-elle expliqué lors d’une interview accordée au CNC.
L’intrigue de la série se déroule dans le nord de la France. Initialement pensée à Calais, plaque tournante migratoire entre la France et l'Angleterre, c'est finalement en région normande et principalement à Cherbourg que la production a décidé de poser ses caméras. Malgré des conditions difficiles, les deux actrices principales ont assuré au Parisien avoir beaucoup ri sur le tournage : "Quand tu dois jouer la décontraction en crop top au mois de décembre alors qu'il fait moins 10 degrés, ce n'est pas évident. On a vraiment eu très froid, jusqu'à en insulter des gens.", a avoué Charlotte Le Bon.
En 2008, Virginie Brac dirige l’écriture de la deuxième saison d’Engrenages et fait monter d’un cran l’importance des personnages féminins qui évoluent dans un monde d’hommes. Cette ambition féministe ne l’a pas quitté depuis et l’a poussé à écrire une histoire d’amitié féminine de la même envergure que celle de Thelma et Louise. "La différence avec le film de Ridley Scott, c’est qu’il s'agit d'une success story.", nuance-t-elle auprès du CNC. A l’écran, ce duo féminin est incarné par Veerle Baetens et Charlotte Le Bon. "Depuis que j'ai vu Alabama Monroe, je voulais écrire un rôle pour Veerle Batens", a assuré Virginie Brac au Parisien. "Je savais qu'elle ferait une Cheyenne parfaite avec suffisamment de mystère, de délicatesse. Charlotte Le Bon, en revanche, est arrivée sur le projet bien plus tard. On ne cherchait pas qu'une blonde ravissante, on voulait quelqu'un qui a une petite étincelle d'humour, de différence."
De sa propre initiative, Veerle Baetens a relevé le défi de se raser la tête pour le rôle de Cheyenne lors d'une séquence du premier épisode. Voulant approfondir son exploration du personnage, elle a tenu à se démarquer de son binôme féminin en adoptant un style radical qui tranche avec la féminité de Lola.
Selon Virginie Brac, une sensibilité flamande s’est greffée artistiquement à la série. L’accent de la comédienne belge Veerle Baetens y est pour beaucoup, à l’instar du cadre et de la mise en scène. "Le décor est très important. L'immensité de la mer. Ces grandes plages. Ce côté perdu. Ce n'était pas volontaire au départ. C'est venu du réalisateur, Eshref Reybrouck, flamand, qui s'est pris de passion pour la série et a tenu à diriger lui-même les huit épisodes. Il est venu avec un chef opérateur flamand qui a capté de superbes plans et de très belles lumières.", raconte la créatrice au cours d’une interview au CNC.