Oui c’est vrai, on peut relier « Away » à « The First » ; oui, c’est vrai c’est lent ; oui, c’est vrai ça traînasse ; oui, c’est vrai, ça pleure beaucoup !! Mais « Away » narre le récit d’un voyage vers la planète Mars. Ce que je trouve intéressant même si pour certains le mot est un peu fort, cette lenteur s’inscrit dans le récit. Elle est à l’image de ce long et interminable voyage. Ainsi, on prend le temps de connaître les astronautes : Emma Green (Hilary Swank), Lu Wang (Vivian Wu), Misha (Mark Ivanir), Kwesi (Ato Essandoh) et Ram (Ray Panthaki) avec les inévitables flash-back. C’est un récit qui s’attarde sur le quotidien de ces astronautes en partance pour Mars. Et dans ce quotidien passé dans un vaisseau spatial, enferme des caractères qui s’affrontent, se côtoient au grès des tracasseries techniques, bref, tout ce qui se rapporte à l’humain et au monde du travail ; seulement, ce n’est pas n’importe quel monde du travail, c’est dans une capsule spatiale en route pour Mars. Dit ainsi, ce n’est pas passionnant, autant voir un documentaire. Nous sommes d’accord. Mais si on accepte ce postulat, la série se regarde sans pénibilité. « Away » se démarque de « Gravity », de « Interstellar » ou la mini série française « Mission » ou même « Mars » série en deux saisons diffusées sur National Geographic. Ici pas d’alien dans le vaisseau, pas d’épidémie, pas de comploteurs au sein de l’équipage. La nature humaine individuelle compose avec ses défauts, ses qualités, ses humeurs pour et dans l’intérêt de la collectivité. C’est simple et pourtant compliqué comme l’est la nature humaine et d’autant plus compliqué que c’est dans… un vaisseau spatial ! Et d’autant plus compliqué qu’il y a des sensibilités culturelles différentes. Je ne crois pas que la série « Away » ait été vendue comme un film d’action avec explosions, intrigues et meurtres. Pourquoi ne pas accepter que « Away » est une série qui illustre le quotidien d’astronautes, tout simplement ? Ça passe ou ça casse. Apparemment ça casse. Dommage de ne pas laisser du temps au temps ou tout simplement avoir du courage d’imposer une série où les rapports humains sont au centre de l’univers ! D’aucuns s’étonnent de la qualité des communications ; c’est vrai, ça téléphone beaucoup jusqu’à l’épisode 5. Là encore, « Away » à défaut d’être une série d’action, demeure une série de science-fiction. A ce jour, la NASA n’a toujours pas envoyé d’astronautes sur Mars ! Pas plus que les russes ou les chinois ; ces derniers se sont contentés d’explorer la face cachée de la Lune. Donc, étant une série de science-fiction, ne peut-on pas accepter l’idée que les communications téléphoniques ou visuelles aient progressé ? Ça ne m’a pas choqué. Enfin, comme « Proxima » ou « The First » on a droit à de nombreux questionnements. De la part des astronautes pour commencer. Voilà des individus qui ont bossé comme des fous, qui s’apprêtent à réaliser un rêve de gosse ; pendant longtemps, ils se sont convaincus que rien ne les arrêtera, qu’ils iront jusqu’au bout… mais… mais il y a la famille. Et nécessairement, ça tiraille par moments. Le candidat à l’Espace oscille entre détermination et culpabilisation. Les questions, les doutes infimes soient-ils sont légitimes. Comme « The First » et « Proxima », on a affaire à des être tout simplement humains. On ne parle plus de mission de quatre à six mois à la Station Spatiale Internationale, on parle d’un voyage sur Mars, inédit et périlleux. Ce n’est pas rien de partir pour trois ans, laisser sa famille avec tout ce que cela implique comme dommages collatéraux pour ceux qui restent. Oui, comme « Proxima », « Away » fait la part belle à ceux qui restent. Nous avons d’une part des astronautes avec des failles parce que inédit - il est bon de prendre en compte l’aspect mental sur un très long voyage spatial, ce dont « Away » s’applique à illustrer (ou tenter) et d’autre part ceux qui restent : Matt Logan et sa fille par exemple (Josh Charles et Talitha Bateman). Maman ne part pas en formation à l’autre bout du pays, elle ne reviendra pas le week-end. C’est une mission de trois ans dans l’Espace et sur Mars. Les dommages peuvent être d’ordre physique : par exemple, un long séjour dans l’Espace diminue la masse osseuse. Dans quel état physique et psychologique se retrouveront les uns et les autres ? Nous avons deux discours : celui des astronautes d’une part, comment concilier vie de famille, vie sentimentale et passion à assouvir coûte que coûte ; celui de ceux qui restent d’autre part, encouragement et reproche lié au ressenti d’abandon. Pas facile pour les deux camps. A cela s’ajoute une famille unie. Eh oui ! D’où une certaine mièvrerie que dénoncent quelques uns. Je veux bien par moments l’accepter. Mais pour une des rares fois, « Away » ne tombe pas dans le cliché ado rebelle imbuvable, ingrate ; de parents divorcés ou torturés après la perte d’un enfant ; de l’infidélité à tout va. Cela me fait penser à un sketch d’Elie Semoun, je ne sais plus lequel où il joue deux ados. Une fille et un garçon. L’une a des parents divorcés, l’autre ses parents ne le sont pas et se fait chambrer car il n’est pas dans la norme ! Ben oui, la famille d’Emma est unie. Une mièvrerie pour certains ! Ouh la la, une famille sans problème, c’est de la mauvaise science-fiction, un nanar ! On a juste droit à un mari victime d’un AVC tout en respectant le cliché de l’ado qui ressent l’abandon et qui se cherche. De plus, elle ne fréquente pas un voyou pour pimenter le récit. On peut reprocher à « Away » d’être lisse, de manquer d’aspérité mais je ne pense pas que ce soit mièvre. A chacun sa perception. Cependant, j’ai ressenti par moments une petite tension, certains épisodes ont fonctionné sur moi et me suis laissé emporté par l’émotion que suscitent certaines situations. A partir du moment où l’émotion est là, je me sens concerné. Et puis, j’avoue que l’Espace me fascine et m’enchante quel que soit le récit. J’adore « Alien », « 2001 Odyssée de l’Espace », « Interstellar », « Apollo 13 », dernièrement « For all Mankind » par exemple, et je peux aussi apprécier « Away ». Alors, oui, « Away » n’est pas spectaculaire, mais ce n’est pas un fleuve tranquille. Il n’est pas nécessaire de cumuler déboires sur déboires. Les relations familiales et professionnelles ne sont pas un fleuve tranquille par nature. Et « Away » m’a fait rêver dans les dernières séquences du dernier épisode. « The First » comme « Proxima » narre un récit d’Espace sur Terre. Là, on passe 9 épisodes dans une capsule spatiale en route vers Mars. C’est à la fois culotté et périlleux en terme d’audience. « Away » ne survivra pas à une seconde saison et c’est bien dommage. Une deuxième saison aurait dû être assurée. Cela dit, la fin de la première saison peut se suffire à elle-même. Le but a été atteint. « Away » aurait dû être concentré en 8 épisodes. Sans doute cela aurait permis une seconde saison. Au-delà de l’audience ingrate ou implacable, c’est selon, « Away » souffre de la lâcheté mercantile de Netflix qui jette comme bon lui semble les séries dans la poubelle des kleenex. J’ai toujours défendu l’idée de deux saisons minimum pour donner une nouvelle chance à une série ou pour la conclure dignement. « Away » ne s’en sort pas trop mal par sa conclusion et pour l’intérêt de la série elle-même.