Rwanda la couleur du sang a de curieuses particularités et d'horribles défauts qu'il partage incidemment avec énormément de séries ARTE. Etonnemment NETFLIX a produit et diffusé le truc en ce disant peut être que ca ferait une parfaite série ARTE ? DIalogues génériques, pilotages automatiques des acteurs, mise en scène confinant à la misère et prises de risques désactivés par l'énormité des ficelles employées. Il va falloir nager pour apprécier la rigueur de l'ensemble qui part d'un postulat séduisant (peut être), une rescapée tutsie va faire justice en allant retrouver et démasquer les tortionnaires de son peuple. En prenant ce pari d'une Klarsfeld tutsie, la série finalement trouve son meilleur rythme, mais l'idée est terriblement casse gueule. Car ce qui me semble poursuivre la série c'est justement tout un territoire de simplification narrative qui contamine à la fois les rapports entre les personnages et les rapports géopolitiques pour en faire un terrain de jeu factice, prompte à des émotions télécommandées et qui confinent à l'indigence. Le jeu d'acteurs et lui aussi parasité d'intentions trop claires et d'un professionnalisme cadavérique. Ornée d'insupportables effets de réels qu'il exhibe à l'image de la deuxième saison de jeux de pouvoir, la série constamment déploie contre elle même tout les défauts d'un didactisme souvent grotesque. La série déploie au début un arc narratif plus qu'intéressant, la poursuite des tueries de masse dans le Nord-Est Kivu et la volonté d'une CPI de tenter d'en saisir l'un des responsables à la solde du Rwanda. Bizarrement la série prend le parti d'un terrible assassinat devant la CPI pour bifurquer vers l’introspection génocidaire. Cette bifurcation laisse en suspend l'autre intrigue obsédante, qui laisse un gros doute sur les intentions des producteurs (faire du Rwanda un havre de justice et de paix, ok pourquoi pas, sauf que Kagamé n'a rien de la chef d’État représenté dans le film), que la série liquide brutalement. La responsabilité du Rwanda, du Burundi et de l'Ouganda sur la perpétuelle déstabilisation (jusqu'au deux guerre du congo les plus meurtrières du 21 éme sciécle) de cette immense région de la RDC ne semble pas plus que ça émouvoir nos ambitieux producteurs Très vite le terrain de la culpabilité française se révèle comme les autres arcs narratifs de la série très peu convaincants, éludant les réels griefs qu'une France salement responsable a opposé à Kagamé (la disparition de milliers de hutus lors de l'avancée du FPR sur Kinshasa). La série déploie donc l'histoire d'un prêtre assassiné qui justifierait une extradition (encore un postulat incroyable qui pourtant va faire le sel de l'intrigue principale). A l'image des casques bleus essayant d'arrêter un génocidaire, la série ne sait rien filmé correctement, si ce n'est nous réveillé avec de la cervelle répandue au sol. En tout cas rien de trop compliqué pour la notre, le film plonge dans le passé génocidaire d'une manière si mélodramatique, qu'on ne sait plus à quel saint se vouer, et n'a pas la moindre décence pour parler du présent. Le mot RDC ne sert qu'une fois, Nord Kivu n'existe pas, les congolais pas plus, alors le M23, pas la peine. Par contre le Rwanda est exemplaire, cool, démocratique et ils sont super sympas. Ce trou noir ronge le récit de l'intérieur, faisant des victimes du passé la forêt qui cache les cimetières du présent. Plus grave la série de cette manière prend le pari d'invisibiliser un peu plus un conflit majeur, dans une zone de tension hyper activée par le génocide.