"Le bazar de la charité" : une série que je n’avais pas vu venir et que j’ai commencé à regarder un peu par hasard, seulement attiré par les décors et les costumes d’un autre temps. Contrairement aux divers avis très négatifs figurant en première page des avis définis comme étant les plus utiles, j’ai passé un très bon moment. Et alors qu’elle vient de se finir au terme du huitième épisode, je dois admettre que c’est avec regret que je me vois dans l’obligation de quitter les trois héroïnes, tant cette saga m’a amené loin. Tout au long de ces huit épisodes, les réalisatrices Catherine Ramberg et Karine Spreuzkouski nous ont offert une superbe mise en scène, pas forcément très originale et inventive, mais ponctuée de plans magnifiques dont on se souviendra. Et comme pour faire écho à la qualité technique des deux réalisatrices, le casting a répondu présent de façon remarquable, mais j’y reviendrai un peu plus loin. J’ai été si bien accroché par l’entame de cette petite série qu’il était hors de question que je rate le reste. Je dois dire que j’ai été d’entrée saisi par l’entame mettant en prise les époux de Lenverpré. Une scène choquante, et qui sera ressentie comme telle quand on condamne ce type d’agissement. Et c’est là que je vais commencer à parler du casting : on se prend à trembler pour Adrienne de Lenverpré, incarnée par une Audrey Fleurot plus belle que jamais dans les tenues en vogue de cette fin du XIXème siècle. J’ai noté au passage quelques plans qui mettaient en valeur son teint de peau et la couleur de ses cheveux. C’est à en tomber par terre… Le fait est que… je suis tombé par terre ! Mais si je suis tombé par terre, c’est à cause de la prestation époustouflante de Gilbert Melki, véritablement bluffant dans la peau du candidat apparemment incontournable à la présidence du Sénat, j’ai nommé Marc-Antoine de Lenverpré. Sans compter que le concernant, on va aller de surprise en surprise. C’est donc naturellement à cet acteur que j’adresserai ma mention spéciale, d’autant qu’avec Audrey, il nous offre une première scène saisissante, magnifique de tension et d’inquiétude, cueillant pour ainsi dire le téléspectateur à froid. Ce dernier se verra vite réchauffé par la tragédie du 4 mai 1897, drame au cours duquel il va être invité à suivre deux autres destinées : celle d’Alice de Jeansin et de sa bonne, prénommée Rose. La première est incarnée par une Camille Lou pas toujours des plus convaincantes, sauf quand elle doit affronter son père (Antoine Duléry). Forcément, la trame se tissant principalement dans la haute société parisienne. La seconde, jouée par Julie de Bona, est celle que j’ai le moins aimé des trois héroïnes. En plus, elle n’a pas été aidée par un maquillage que je qualifierai de contestable, et je ne parle même pas de la vitesse à laquelle elle semble se remettre de ses blessures. Cependant on ne peut rester insensible au triste destin auquel les trois femmes semblent promises, et c’est en cela que cette série est remarquable. Les plans, la mise en scène, le montage, et la qualité du jeu d’acteur pour une majeure partie du casting font qu’on reste accroché jusqu’à la fin. Certes on passera sur les inexactitudes historiques, et plus précisément sur les manques, mais l’histoire telle qu’elle nous a été livrée est tellement riche qu’il semble difficile de parler de tout sans rallonger la série. Alors bon, des choix ont été faits, et chacun se fera sa propre opinion là-dessus. Mais n’oublions pas que les scénaristes ont décidé de s’attarder sur ces trois femmes seulement. Point de vue casting, je dois rajouter une petite mention spéciale à la petite Rose de Kervenoaël, cette gamine qui joue la fille de Lenverpré. Elle est déjà très douée ! J’ai beaucoup aimé aussi la prestation de Théo Fernandez dans le rôle de Julien de la Ferté, bien que ce rôle n’est pas des plus sympathiques. Mais au moins, il réussit à nous faire vivre une certaine aversion envers son personnage. Pas autant que Gilbert Melki, hein : après tout, il y a une sacrée différence entre un couard qui n’assume pas et une crapule finie. Parmi les autres acteurs que j’ai beaucoup aimés, je dois citer Stéphane Guillon, superbe de présence, de charisme dans la peau d’un « flic » incorruptible au flair infaillible. Il y a aussi Aurélien Wiik, résolument touchant dans la peau du cocher meurtri. Je n’oublie pas Florence Pernel, excellente dans cette colère lancinante qui anime son personnage vis-à-vis de son mari. Ben tiens, puisqu’on parle de lui, Antoine Duléry nous ferait presque ressentir de la peine envers son rôle. Très bon lui aussi dans son domaine. Et puis il y a aussi Josiane Balasko, qui prouve une fois de plus qu’elle sait tout faire, cette fois en femme du monde austère et peu avenante. Gilles Cohen est une fois de plus dans un rôle qui semble éternellement taillé sur mesure pour l’éternité : un rôle antipathique au possible. Je cite également Sylvain Dieuaide en Pierre-Henri de la Trémoille, qui a presque réussi à éclipser Gilbert Melki. Tous les autres sont corrects, à commencer par le tout jeune Adrien Guionnet. La série se caractérise en trois temps, voire quatre si on décortique : d’abord le drame après une rapide présentation des personnages, ensuite les larmes, et enfin le temps des secrets. Et comme je fais partie de ceux qui croient que tout finit par se savoir un jour ou l’autre, la révélation des secrets. Enfin peut-être. Pour certains sans doute, pour d’autres rien n’est moins sûr. Hé ! hé ! j’aime bien brouiller les pistes lol ! Sauf que malheureusement, le dénouement final reste assez prévisible. Mais reconnaissons tout de même à nos réalisatrices-scénaristes cette capacité à mener une série à plusieurs tiroirs : l’amour bien sûr, l’acceptation de soi (ça c’est pour Rose), mais aussi le pouvoir, les faux-semblants, le fait d’assumer ou pas ses actes et/ou responsabilités, les violences conjugales, le qu’en dira-t-on… Après on peut rechigner sur la teneur de certaines répliques. Je parle là de l’utilisation du vocabulaire parfois fleuri. Pour ce faire une idée plus précise, il serait de bon ton de se pencher sur des ouvrages de cette époque. La tâche risque d’être assez ardue pour répondre à cette question problématique. Encore qu’elle est problématique parce qu’on le veut bien. Mais n’oublions pas que la langue de Molière évolue sans arrêt, et que nous ne sommes plus au temps des rois, époque à laquelle le vieux français était utilisé avant de laisser place à des phrases animées par une certaine emphase (du moins dans la haute aristocratie). Et puis je me dis qu’après tout, 1897 : ce n’est pas si loin que ça ! Tout ce que j'espère, c'est que la production saura arrêter cette série là. Personnellement, je ne ressens pas le besoin que ça aille plus loin malgré la porte laissée ouverte.