Attention, elle arrive. Qui, Emily ? Non, l'immense vague de clichés absurdes de ce produit uniquement formaté pour le public américain. En France, on ne peut pas regarder cette série sans subir le flot continuel d'idées reçues datant du Paris d'il y a cent ans, la sacro-sainte fascination devant le french style ("OMG une croissante !"), les personnages caricaturaux au possible et les panoramas de Paris de cartes postales toutes les deux minutes... On voit bien que le public visé est américain, d'une part au travers des dialogues en anglais (les français parlent en anglais avec un fort accent même lorsque Emily n'est pas là... Vous avez donc parfois plusieurs français, seuls, qui s'évertuent à parler un mauvais anglais entre eux. Vous trouvez cela illogique ? You're smart.) et auditivement, un autre indice vous met sur la voie : la musique. Cette BO composée de musiques au mieux bobos (on reste bloqués sur les paroles neuneus et les mélodies d'ascenseurs qui les accompagnent... On a même reconnu la musique de la pub des magasins Aldi, ça c'est la classe à la française) au pire qui sont des chansons d'apprentissage de vocabulaire pour les cours de français aux États-Unis (véridique, on les a aussi reconnues...). Et évidemment, on ne peut pas parler musique en France sans dégainer Edith Piaf, que vous ne pourrez pas manquer dans une séquence ultra-gênante (l'amie qui écorche La Vie en Rose sur la place publique, en entier... Que c'est long), et une autre fois à la fin de la saison (Non, je ne regrette rien). On tombe aussi les sonotones quand on entend certains dialogues qui veulent nous apprendre le français avec des leçons fausses ("on ne peut pas dire excité pour dire enthousiaste"... Dommage, on peut, il fallait réviser son français niveau A1 avant d'écrire ce dialogue). Assez parlé du massacre auditif, passons aux yeux. Si l'on en croit Emily in Paris, tous les hommes français sont des obsédés sexuels (il suffit que la miss passe devant un homme pour qu'il ait immédiatement envie de la "séduire", pour rester polie) et les françaises ne sont bonnes qu'à être trompées et même à cohabiter avec les maîtresses (mais ce n'est pas grave, car on cite : "ça se fait en France"... Ignoble) et de façon générale, les français et françaises sont des gens méchants (les collègues écœurants, le chef et le serveur du restaurant qui refusent de servir la cliente par fierté culinaire, la concierge gueularde, le couturier limite bipolaire qui crie sur tout le monde, etc... Beau panel). Mais on se console un peu en se disant que les clichés ne touchent pas que la France, en de rares occasions, avec l'amie chinoise d'Emily (qui au mieux n'a pas su conjuguer un verbe au passé, au pire n'est pas au courant que la politique de l'enfant unique est révolue depuis 2015). On aime (follement) aussi le caractère nunuche d'Emily, les jeux des acteurs au bord de l'AVC, le final d'une facilité confondante, la musique "pouêt-pouêt" (on n'a pas d'autres mots pour désigner ces coups de trompettes qui sont censés être la piste sonore des transitions visuelles) et une France réduite à ses plus bas (et faux) clichés : de la mode, du snobisme, de l'obsession sexuelle et des croissants. Il ne manquait plus que le Mime Marceau, le béret et l’accordéon pour finir le tableau... Allez, nous, on retourne vers les vraies séries bien faites, avec notre café et croissant à la main.