Voilà une série pleine de bonnes intentions, bien menée (un peu prévisible quand même, et je ne parle pas nécessairement du suicide de la protagoniste), qui affiche clairement ses visées de sensibilisation des jeunes au suicide, à la dépression et aux victimes de viol, et qui espère apporter sa contribution à la lutte contre le harcèlement scolaire.
C'est très louable et ça se regarde bien.
Mais à mon sens, la souffrance d'Hannah n'est pas suffisamment montrée au téléspectateur. Non pas qu'il aurait fallu l'exhiber littéralement ravagée physiquement (encore qu'elle reste un peu trop fraîche pour quelqu'un qui a perdu le sommeil, un peu trop apprêtée, aucune gradation de côté entre le premier et le dernier épisode). Après tout, il s'agit aussi de montrer que certes, parfois, la souffrance morale n'est pas visible physiquement et qu'on peut très aisément passer à côté (la série met l'accent sur la nécessité de communiquer et de se soucier de son prochain, donc d'aller au-delà des apparences), mais globalement, comment dire, on reste assez extérieur aux tourments d'Hannah, on ne les vit pas, on n'en saisit pas clairement l'intensité autrement que par son suicide, on ne ressent pas au fond de soi comment elle a pu en arriver là.
Cette souffrance morale terrible, qui écrase tout et contraint à l'issue fatale, on ne la voit pas. Il aurait fallu peut-être que les passages correspondant à la vision d'Hannah soient moins lumineux, moins colorés, plus ternes, moins lisses, moins "Beverly Hills", moins "teen movie", qu'on saisisse à travers les images/décors et pas uniquement à travers les monologues ou les faits à quel point son monde intérieur était dévasté, à quel point elle avait perdu tout espoir, à quel point elle se sentait détruite et finie, à quel point elle était en danger. Les détails, l'accumulation de petites choses qui blessent et la conduisent à l'isolement, les regards indifférents, le rejet des autres, leur incompréhension, n'en auraient été que plus frappants et la série aurait certainement atteint son but de façon plus efficace. Sur ce plan, elle reste très timide, alors que le sujet aurait mérité un peu plus de courage.