Sortie du rayon, Saison 3, troisième diffusion après TV et achat de la série, soit cinq ans après. La Saison 3 propose avant chaque épisode un « Previously » où sont insérées des scènes « ajoutées », des scènes pas vues du tout lors des épisodes précédents. La Saison 3 est une saison perturbée : violence physique entre Moira/Max et Jenny, séparation entre Dana et Alice, impatience entre Bette et Tina, colère entre Carmen et Shane et surtout disparition brutale de Dana. La Saison 2 respirait la réparation, la réconciliation, l’optimisme, la Saison 3 craint. Dès les premiers épisodes, il y a malaise entre Bette et Tina alors qu’à la toute fin de la Saison 2, Tina réintégrait le foyer ; Alice et Dana sont séparées ; Alice est ravagée par cette séparation alors que Dana qui a renoué avec Lara semble vivre très bien cette nouvelle relation. On apprendra à l’épisode 10 que Dana ne quitte pas Alice pour Lara mais parce qu’elle ne s’entendait plus avec Alice. Ah bon ? Dana, le fil rouge de cette Saison 3. Sa disparition fait mal car elle illustre la disparition non seulement d’un personnage sympathique mais la disparition d’un des personnages principaux. « The L word » s’inscrit vraiment dans un réalisme brut de décoffrage. Oui, comme dans la vraie vie, on perd une amie, celle-ci part trop tôt. Comme dans la vraie vie, la mort peut frapper à tout moment même une personne sportive, solide, pleine de vie. L’impact est une déflagration ! Evidemment, ce peut être interprété comme une facilité scénaristique ; Erin Daniels allait s’engager dans un autre projet incompatible avec la série. Peu importe, je suis plongé totalement dans « The L word » et je ne vois que Dana. Dana et Alice, c’était LE couple après Bette et Tina. Combien j’avais de la peine pour Alice et combien je fus chagriné de sa disparition. Dans l’épisode 10 « Loin de vous », le montage est saisissant. Au moment où Dana se meurt, Carmen et Shane font l’amour, Bette a fui sa retraite bouddhiste, Helena est effondrée par la trahison de Dylan. Quelques heures avant, l’infirmière pousse Alice à aller s’aérer après avoir passé 5 jours dans la chambre au côté de Dana, à participer à sa toilette, à lui tenir la conversation. Alice la dévouée, tient à accompagner Dana le plus loin possible. Elle finit par suivre les conseils de l’infirmière, elle s’absente pour acheter deux boissons, une marguerite rigolote au large sourire qui danse et chante sur sa tige, dans son pot. Le large sourire de la marguerite fait penser au sourire de Dana et à celui d’Alice. Alice et Dana sont deux marguerites rigolotes. Elle rencontre Tonya et garde pour elle la maladie de Dana. On peut y percevoir un sentiment de culpabilité, mais on peut comprendre qu’elle ne veuille pas partager ce moment qui lui paraît privilégié, à elle ; et puis Tonya fait pas partie de la bande ! Le plan où Alice découvre Dana décédée est poignant. Alice est laminée et sa chute au sol déclenche la petite chanson de la marguerite dansant sur sa tige. La séquence est réussie. Quelle émotion. Une des rares comparées aux deux précédentes saisons. Au-delà de la mort de Dana, Alice n’a pas répondu présente, elle n’a pas pu lui tenir la main pour l’accompagner dans sa dernière demeure éternelle...
Deux nouveaux personnages principaux, si je puis dire : Angus et Moira/Max. Tim parti, Mark parti, voilà Angus, personnage masculin sympathique, l’amoureux transi de Kit. Moira, l’amie de Jenny se « transformera » peu à peu en Max. Un second homme dans la série ! Personnage surprenant par ses accès de colère et par des propos parfois justes et sensés. Dans l’épisode 10 « Loin de vous », Jenny et Moira/Max déjeunent avec Tim (content de le revoir) et sa nouvelle femme, enceinte. Jenny, dans cette saison est froide, limite méprisante, a l’audace de faire passer Tim pour un salaud. Moira/Max a l’objectivité de la contredire, ce qui déplaît à Jenny. Celle-ci juge avec dégoût la vie tracée de Tim : mariage, femme, enfant, maison résidentielle. Ce à quoi Moira/Max réplique « Il n’y a pas de mal à être heureux ». Selon Jenny, son mode de vie est plus instructif, est plus épanouissant intellectuellement que la vie cadrée de Tim. Elle sous-entend que seuls les homosexuels ont une vie trépidante, érudite. Jenny confond tout. Sa haine des hommes est inquiétante même si elle est abimée par un passé. Elle parvenait à m’émouvoir de temps en temps dans les deux précédentes saisons, là, elle m’irrite profondément. Elle se complaît dans une certaine tristesse et souhaiterait entraîner son monde dans son sillage. Pour moi, elle est une pièce rapportée, une fausse homo qui se la joue. Helena « le double de Bette » se révèle dans cette saison moins guindée, plus souple, plus sympathique. La Saison 3 confirme la vulnérabilité de Bette dès lors qu’elle ne contrôle plus rien, alors que Tina s’affirme. A son tour d’être par moments vexante envers Bette. Dans cette saison, on découvre le caractère parfois excessif de Carmen envers Shane ; ses origines latino-américaines m’amusent mais pas Shane. Elles forment un beau couple. Je peux comprendre Shane, les crises de jalousie de Carmen sont usantes, mais cela donne à la saison un côté récréatif dans la mesure ou Alice et Dana n’assurent plus ce rôle (Alice m’amusera avec sa compagne vampire).
Shane doublement troublée et troublante en demandant la main de Carmen d’une part et ne se présentant pas devant l’autel d’autre part. Dur dur.
On y voit une Shane sensible, émue à l’idée de trouver une famille, celle de Carmen ; au point de renouer de son côté avec son père, lequel sera fatal à Carmen.
Enfin, je rends hommage à Lara. Dans la première saison, elle se fait virer comme une chaussette par Dana qui à ce moment-là refusait d’afficher son homosexualité. En fin de la saison 2, elle représente un danger pour Alice, confirmé dans la Saison 3 puisqu’elle retrouve Dana. Moi aussi, je suis comme Alice, retrouver Lara m’inquiète. Mais, j’ai bien compris après plus de vingt épisodes, que les amours lesbiens se font et se défont au grè d’un sourire et celui de Lara est agréable. C’est pourquoi, je ne lui en veux pas ; je regrette seulement que Dana soit faible... Mais leur première rencontre avait comme un goût d’inachevé. Face à la maladie, Dana révèle un caractère impossible : acariâtre, égoïste, ingrat envers Lara, impuissante et de bonne volonté. Seule Alice aura l’honnêteté de recadrer Dana. Dana est conforme à son personnage, n’était-elle pas sarcastique, parfois blessante ? Les scénaristes on vu juste, et pourtant, il est difficile de lui en vouloir. C’est comme l’ivresse, il y a ceux qui ont le vin mauvais et le vin joyeux. Dana à la maladie mauvaise. La série nous dit aussi : qui peut affirmer être bien préparé quand on se sait condamné ? Scènes terribles où les parents de Dana mentent à leur fille ; où ces mêmes parents font tout pour interdire à Lara de rejoindre Dana allitée. Cette Saison 3 est triste, Dana, Shane et Carmen, Tina et Bette. Dans les bonus, concernant la disparition de Dana, on y voit une Katherine Moennig qui n’accepte pas la disparition de Dana ; on dit que Leisha Hailey avait de la peine et appréhendait de jouer la fameuse scène. Il y a là encore quelque chose de troublant dans cette série. La disparition fictive de Dana est comparable à la « disparition » d’Erin Daniels de la série. Tout comme Shane, Katerine Moennig refuse cette disparition. Cette « mort ». On sait les filles très soudées depuis l’aventure de la Saison 1. Je peux très bien imaginer combien l’absence d’une amie peut peser. Ilen Chaiken et ses scénaristes ont réussi à entremêler la réalité et la fiction. C’était déjà un peu ça dans la Saison 2 avec Tina/Laurel enceinte et la disparition du père de Bette et de Kit/ Ossie Davis, décédé.
Dans la série « j’aime j’aime pas » : j’aime Alice, Dana, Tina, Lara, Angus, Bette, Carmen et Shane, le plaisir de retrouver un tout petit instant Tim, le couplet de Bette sur « l’anti-patriotisme » ; j’aime un peu Moira/Max ; j’aime mieux Helena ; je n’aime pas Jenny et les propos de Bette à son avocate revendiquant « le droit du sang » pour justifier la garde pleine et entière de sa fille Angélica, j’aime pas du tout la mort de Dana ! A savourer en VO.