Ce que j'apprécie le plus dans cette série ambitieuse, c'est qu'elle ne cherche pas à simplifier bêtement les choses mais bien à montrer la complexité des enjeux dans le milieu politique où amour, amitié, trahison et ambition justifient les pires magouilles au niveau local, national et au sein d'un même parti, le tout mélangé avec les politiques françaises et étrangères. Si on peut se douter que certaines choses sont exagérées à des fins purement narratives, la résonance du scénario avec des événements présents ou légèrement passés est saisissante. En effet, la série s'inscrit parfaitement dans notre époque, utilisant des éléments de langage bien trop souvent entendus (le Karcher, la faute morale, ...), faisant allusion à des affaires mémorables (fraude fiscale, détournements de fonds, népotisme), rappelant des débats très actuels (dépénalisation du cannabis, les suppressions de postes dans l'éducation, le pouvoir militant des lycéens, renégociation des traités européens, etc...) et présentant un contexte tout sauf étranger (la montée du FN). Comme pour House Of Cards, l'essentiel n'est pas de détailler la construction des lois mais de montrer les actions des hommes et femmes politiques pour accéder au pouvoir et y rester tant bien que mal, offrant des rebondissements bien dosés et des stratagèmes malins. Sans céder au cliché du "tous pourri", j'ai trouvé pertinent que la série ne fasse aucune distinction entre les partis, plusieurs dialogues ciselés et percutants ne manquant pas de balancer des réparties cinglantes sur l'extrême gauche, les écologistes, le FN, la gauche et la droite, prouvant que l'appétit pour le pouvoir et le recours à l'illégalité n'ont pas de couleur politique. D'un point de vue technique, la réalisation est excellente (à l'exception de quelques baisses de rythme), alternant les plans aériens (notamment pour la ville de Dunkerque que je ne connais pas mais dont le centre-ville apparaît très joli) et les plans serrés au plus près des personnages. Côté acteurs, Kad Merad crève l'écran dans un rôle inhabituel pour lui, alors que Niels Arestrup est très convaincant dans un style très "force tranquille". Par contre, j'ai eu un peu de mal au départ avec Anna Mouglalis, dont le timbre de voix particulier est assez perturbant, mais l'actrice, comme son personnage, ont pris de l'épaisseur au fil des épisodes. Au final, Baron Noir est d'un réalisme étonnant, complexe, très bien interprétée et visuellement irréprochable. Un poil d’exagération, des petites pannes de rythme et des débuts mitigés pour Anna Mouglalis sont les maigres défauts de cette saison 1 captivante.