Ah Scream Queens...il fallait absolument que je revienne sur cette série injustement accusée d'abrutir le téléspectateur. Je ne tenterais pas de la résumer, c'est beaucoup trop n'importe quoi et puis, pour être franc, l'histoire tout le monde s'en fout, le showrunner compris. Il s'agit d'une série créée par Ryan Murphy, un poids lourd de la télé américaine notamment à l'origine de Glee et American Horror Story dont Scream Queens peut éventuellement être vu comme le croisement à fort potentiel consanguin. Ryan Murphy est un créateur prolifique qui aura su à la fois ruiner des histoire au long cours dont il se lassait (Glee, Nip Tuck) et redonner ses lettres de noblesse à l'anthologie, genre qui lui convient bien mieux (AHS, ACS). Il a souvent divisé à cause de son goût pour l'outrance tout en se faisant remarquer pour la subtilité de ses propos sous-jacents. En effet là où des thèmes comme l'homosexualité, la diversité culturelle ou le racisme sont souvent réutilisés par la machine hollywoodienne de manière assez cynique ("tiens, on a qu'à mettre un couple gay ici pour attirer plus de public"), Murphy les met toujours au centre de ses productions et brave le consensuel tout simplement parce que ces sujets lui tiennent vraiment à cœur et qu'il est véritablement engagé. Il est d'ailleurs l'un des seuls showrunners, voire réalisateurs actuels, à mettre constamment au premier plan des personnages féminins forts, complexes et variés. C'est également un réalisateur très doué qui a su passer par tous les genres (horreur, comédie musicale, drame judiciaire, médical,...) sans jamais utiliser de mise en scène passe-partout et en réadaptant son style léché et inventif, voire clipesque pour certains. Son œuvre, dans sa globalité, est ainsi un curieux produit à la fois ludique, grand public, cinéphile, ultra référencé, souvent moraliste, outrancier, constamment en demi-teinte. Avec Scream Queens il a décidé de prendre toutes ses obsessions, ses sujets de prédilection, ses qualités, ses défauts, et de pousser les commutateurs à fond pour nous embarquer dans un espèce de trip totalement excessif sur tous les points (c'est un euphémisme, en fait c'est un euphémisme de qualifier ça d'euphémisme). Comme je le disais plus haut, le scénario n'a strictement aucun sens, ça meurt, ça ressuscite, ça remeurt, tout le monde est suspecté d'être un tueur en série à un moment ou à un autre, tous les personnages sont complètement barges, c'est la fête au deus ex machina improbable, du WTF à l'état pur. Mais en même temps il ne prend jamais son spectateur pour un bœuf, dès le premier épisode le ton est donné et le contrat est clair : si on supporte pas les punchlines débitées à 200km/h, les twists qui reposent sur du rien et les caricatures d'étudiants américains tous plus débiles et psychopathes les uns que les autres, ça sert à rien de rester. On a beaucoup comparé SQ à Scary Movie, ce qui est assez logique : si Scary Movie avait osé aller au bout de son délire et s'était doté d'un dialoguiste compétent, il aurait pu ressembler à Scream Queens. Parce que le but de Scream Queens finalement, c'est d'être drôle, et pour peu qu'on accepte le postulat de départ, elle l'est furieusement. On passe d'un humour visuel très direct à des vannes méta hyper maîtrisées et on regarde l'épisode moitié abasourdi par le délire complet, moitié plié en deux. D'autant qu'une nouvelle fois Ryan Murphy s'est entouré d'un casting de reines, dominé par une Jamie Lee Curtis (si ça c'est pas de l'argument !) impériale, qui cabotinent toutes avec génie. Les mecs sont pas mal non plus en beaux gosses décérébrés au dernier degré
(la meilleure idée de casting au monde, confier à Nick Jonas, fantasme de toute une génération d'adolescentes,...le rôle d'un mec gay)
. Tout ça pour dire que mettre des personnages abrutis dans une série ne veut pas forcément dire faire une série abrutissante. Scream Queens est loin d'être parfaite mais elle s'assume comme tel, c'est un plaisir pop-corn fun et intelligent, très cultivé, qui donne la banane.