L’odyssée spatiale est plus qu’un fantasme, car elle deviendra la réalité de l’homme si on se projette assez loin. Zack Estrin et Matt Sazama rebootent alors la série d’Irwin Allen (1965), où Stephen Hopkins a également adapté le récit au cinéma (1998). Ces deux essais ne font pas l’unanimité et la nouvelle version de Netflix aura de quoi diviser. L’aventure familiale sera bien au rendez-vous et c’est la partie la moins séduisante qu’il nous est donné de voir, une fois le temps d’acclimatation atteint. L’objectif Alpha Centauri est le sujet de l’expédition, où l’Homme se cherche une nouvelle habitation, mais aussi une nouvelle identité…
Mais rien ne se passe comme prévu et c’est ce qui fait tout le charme de ce voyage vers l’infini. La famille Robinson utilise la force de la confiance et de la complémentarité des membres afin de survivre à une mésaventure qui les égare de leur nouveau foyer. On en vient à déplacer tous les problèmes qu’on cherche à résoudre. Évidemment, l’environnement extraordinaire peut surprendre, car visuellement, c’est un délice. L’esthétique est soignée au détriment de cette trame de fond qui avance trop lentement pour qu’on puisse aborder des enjeux crédibles en suspense. Pourtant, l’introduction de cette famille est tout à fait maîtrisée, car on nous immerge dans ce modèle idéal de la famille autonome et sur qui on peut compter, malgré les divergences morales. Entre des parents protecteurs, mais qui sacrifient tout pour leurs enfants, et des jeunes adolescents trop pressés ou un jeune garçon trop curieux, nous n’évitions pas les quelques clichés nécessaires afin d’installer un contexte et son lot de tensions qui pourrait arriver au sein de ce groupe, puis au sein d’une tribu.
Mais le point fort n’est pas toujours là où on le croit. L’empathie est le maître-mot de cette escapade qui succède les échecs, sans que l’homme puisse y remédier. Il est face à l’inconnu, il use de la force et de la méfiance pour forger une mentalité et pour diriger les moutons vers un lieu sûr. Derrière, il y a de bonnes intentions, mais l’attachement est superflu, aussi bien pour les personnages que pour la planète qui évolue uniquement pour des besoins scénaristiques. Le danger extrême n’est remis en question qu’avec le robot de fortune qui accompagne le cadet des Robinson et sa conscience innocente et aveugle en la paix. De même, la notion d’isolation et de solitude n’est pas toujours bien mise en scène, alors qu’on se trouve dans un territoire inexploré. On ne peut lier ce concept qu’avec l’absence de figure paternelle qui est travaillé en long et en large. Comme chacun doit se surpasser et augmenter leur estime dans l’esprit de leur entourage, les actes de courage et de sacrifices s’aligneront, mais seront rapidement désamorcés.
« Perdus Dans l’Espace » met toujours en relief les éléments qu’il confronte, par opposition. La maturité fait face à l’engagement obsessionnel et le réconfort fait face à la supervision silencieuse d’un parent. L’intrigue se veut ainsi audacieuse, laissant les personnages qui auront leur passage au premier plan, mais beaucoup sont recalés à demeurer fantômes. Cette sous-exploitation insiste sur l’étude de la complicité entre le robot et les humains, dans leur rapport à la survie. On espère tout de même plus de risques et de difficultés pour cette famille et ces personnages qu’on aimerait connaître individuellement, en train d’affronter une menace plus sèche et moins amicale. Peut-être trouvera-t-on enfin l’identité que cette série pense avoir déterrée, mais qu’elle recherche encore.