Si les débuts sont un peu laborieux, les deux premiers épisodes hachés ou complaisants, la suite, les huit épisodes suivants, est tout bonnement remarquable. C’est bien simple, Ryan Murphy et son compagnon de toujours, Brad Falchuk, réussissent le coup presque parfait en orientant leur nouvelle anthologie vers le judiciaire adapté des grandes affaires américaines. Documentée, soignée, diablement bien interprétée, astucieusement montée, American Crime Story démontre que Murphy est capable de tout, de supplanter le ton léger et parfois grotesque de son inégale American Horror Story pour nous livrer une fresque d’une remarquable intelligence dans les locaux de la cour suprême californienne. Pour l’histoire, en 1994, la star bien-aimée afro-américaine du football US, OJ Simpson, est inculpé pour le meurtre de son ex-femme et de l’un de ses compagnons. S’ensuit un procès dantesque qui verra son cadre sans cesse bousculer, qui dépassera allégrement les frontières d’une simple procédure pénale pour s’étaler sur les maux de la société d’alors.
La médiatisation de l’affaire et des débats au sein de la cour, l’investissement et le sacrifice des jurés, le poids de l’opinion public, les multiples collusions potentielles, tout ça s’entasse sur le dos d’un combat sans féroce entre une accusation convaincue et altruiste et une défense retorse composée d’une pléiade de prestigieux avocats. La guerre est déclarée dès l’ouverture du procès, là où la série commence réellement, et les coups bas, les attaques, les stratagèmes, les trahisons viendront rythmés de remarquables épisodes d’une précision diabolique. Rappelons que le procès d’OJ Simpson fût retransmis en direct à la télévision dans tout le pays. Ryan Murphy peut donc s’appuyer sur du concret, sans compter sur les multiples ouvrages écrits parus depuis lors. La production, les scénaristes, les acteurs, déroulent sans contretemps, architectes d’un polar judiciaire d’une intensité presque inégalée, très précis et habilement déguisé en drame à suspens.
Passionnante de bout en bout, je parle toujours du troisième épisode jusqu’à la conclusion de la saison, la série profite, le terme est faible, d’un casting d’une toute grande classe. John Travolta, accessoirement à la production, Cuba Gooding Jr, Courtney B. Vance, David Shwimmer, Sarah Paulson, épatante, pour n’en citer que quelques-uns, font un travail admirable, tous parfaitement investis dans les costumes de personnages que toute l’Amérique a pu découvrir 20 ans auparavant. Le casting, c’est souvent la force des œuvres de Ryan Murphy, tient incontestablement une place importante dans la réussite du projet.
L’essai est donc parfaitement concluent. Il s’agit même, à mon sens, d’une brillante surprise tant nous n’attendions pas toute cette maturité. Le thème est judicieusement choisi, cela permettant d’ouvrir l’inévitable question raciale, et voici la promesse faite d’une nouvelle anthologie qu’il s’agira de surveiller de très près à l’avenir. Nous attendons donc impatiemment le retour de ACS à Miami avec l’assassinat de Gianni Versace. Espérons que la deuxième cuvée sera aussi bonne que la première. 18/20