Quelle série parle aussi constamment de la mort et de la destruction ? C’est une obsession. Je regarde de nouveau, les connaissant pourtant par cœur, les épisodes de cette 3e saison. Et c’est d’une violence, d’une violence ! Moins visuelle, bien sûr, que psychologique, voire existentielle. La mort, partout, et partout la destruction. Et au cœur de tout cela, la recherche de la Vérité, comme un sale petit secret. Mulder est de plus en plus fou, et de plus en plus constant dans sa folie. Et s’il pleure, une fois, pour une femme qu’il ne connaît pas, cela ne veut rien dire. Cet homme est si dur. Il entraîne les autres dans sa folie. Scully est une sainte, plus mystique peut-être que Mulder. Lui sait à quoi s’accrocher, du moins. Elle, mais elle, elle le suit dans son délire. Elle ne sait pas où elle va. L’histoire d’amour que nous attendions tous ne peut pas venir ; elle ne serait qu’un pâle reflet du lien qui les unit vraiment.
X-Files n’a pas de meilleure saison que l’autre. Cette série est parfaite dans sa structure : à chaque épisode, elle dévoile inlassablement l’ordre secret du monde. Elle construit la chaîne hideuse jusqu’au dévoilement de la Vérité. A cela, il ne saurait y avoir de limites. On peut rire de leurs costumes trop grands, de leur air constamment préoccupé — mais n’est-ce pas l’air de ceux qui cherchent la Vérité ? Ils cheminent, fatigués et constants sur le noir chemin de la Vérité. On peut s’ennuyer à la répétition du même, mais en ce cas, on perdrait tout l’intérêt de cette série. Car c’est bien dans la répétition du même que surgit la Vérité. Comme chez H.P. Lovecraft. Lovecraft, jeune homme peu fait pour la vie, aurait, s’il avait vécu à notre époque, sans doute détesté la télévision et tout ce qu’elle propage. Mais peut-être, dans un moment de compassion pour le monde ou pour lui-même, aurait-il su se dire : « Ah ça, les copains, c’est grâce à moi ! ». Il aurait, oui, il aurait caressé le chat sur ses genoux et aurait souri. Sonia G. serait déjà partie, il serait déjà tout seul, attendant la mort, et peut-être se serait-il resservi un verre de porto avant d’appuyer sur le bouton de sa télécommande. « Je vais en regarder un deuxième épisode », se serait-il dit. « Un deuxième épisode et puis après, au lit. » Le chat dormirait profondément, sentant déjà la mort cheminer en son maître. Un instant, il aurait ouvert les yeux, parce que H.P. aurait dû faire un mouvement parce qu’il avait mal au dos. H.P. s’en serait voulu, mais le chat se serait rendormi aussitôt. On raconte que les chats sentent les morts. Ils soulagent, aussi, les vivants qui ne sont pas faits pour la vie.