La nouvelle série du trio derrière le succès de Damages, Les frères Todd et Glenn Kessler ainsi que Daniel Zelman, Bloodline, démontre une nouvelle fois la qualité proposée continuellement par le géant de la VOD américain, Netflix, cumulant les projets aussi variés qu’ambitieux. Si ici, la trame narrative n’est pas foncièrement novatrice, la construction de chacun des épisodes, technique du moins, l’importance du casting, tendent à faire de ce drama familial douloureux et passionnant une nouvelle démonstration de ce rapprochement entre télévision et grand-écran. En effet, si Bloodline n’est finalement qu’un feuilleton, l’utilisation somme toute assez régulière de Flashbacks et autres flaschforwards nous le confirme, comprenez sauts en arrière et sauts en avant dans le temps, la mise en scène, quant à elle, rivalise avec les productions du grand-écran, sans parler d’un casting aux petits oignons qui renforce l’intérêt du show sur le plan du charisme pur des personnages. Oui, Netflix parvient une nouvelle fois à charmer ses nombreux abonnés en ne trompant personne sur la marchandise et en s’associant pour ce faire avec des personnalités talentueuses de la télévision.
Dans le détail, la série nous propulse dans les basses terres de la Floride, plus communément appelées les Keys, succession d’îlots paradisiaques sur lesquels règnent la famille Rayburn. Propriétaire d’un hôtel charmant, les parents comptent notamment sur un fils inspecteur de police, une fille avocate et un autre entrepreneur. Mais tout ce beau monde doit également compter sur le premier enfant du couple, Danny, frangin mystérieux qui revient au bercail avec l’intention de s’y réimplanter. Ce dernier ramène avec lui tout un tas de mauvais souvenirs et des ennuis à la pelle. Vous vous en doutez, le cocon familial va imploser et les éléments de déchaîner. Les créateurs prennent un risque considérable en nous annonçant d’emblée la couleur, nous révélant dès le premier épisode les différentes destinées de chacun par le biais de sauts dans le temps, vers l’avant. Cela aurait pu, dès les prémices du projet, coulé l’intérêt de rester sagement assis devant les treize épisodes qui composent cette première saison. Et bien non, la puissance des interprétations, la qualité de la mise en scène et la montée en puissance du fond de l’intrigue font de nous des spectateurs acquis à la cause.
Triste, mélancolique, dramatique, Bloodline déroule son intrigue douloureuse sur un rythme passablement lancinant, ceci permettant une approche très intimiste des différents personnages, incarnés par rien de moins que Kyle Changler, Ben Mendelsohn, Sam Shepard ou encore Sissy Spacek. Oui, le casting est prestigieux et la production entend bien faire valoir le charisme des deux principaux protagonistes. Chandler et Mendelsohn sont donc soumis à rude épreuve et livrent, chacun, des prestations de toute beauté. Cette qualité d’interprétation, de charisme, renforce l’impact du drame qui se déroule gentiment mais sûrement sous nos yeux, s’avançant vers un Seanson final que l’on devine aisément percutant, laissant en outre des portes ouvertes à une seconde partie qui nous viendra au printemps 2016. Réjouissance.
Autre atout dans le manche des trois showrunners, l’exotisme du lieu, toujours les Keys, et le talent des différents réalisateurs ayant officié durant cette prime saison. Utilisation classieuse du flou, plans larges à la beauté saisissante, rien n’est laissé au hasard sur le plan technique, tant et si bien que le paradis vire à l’enfer en toute mélancolie. Une réussite indéniable, cette première saison de Bloodline rivalise aisément avec la forte concurrence, malgré ses entournures classiques, malgré ces faiblesses sur le plan de l’originalité pure. On ne peut que saluer les travaux des différents intervenants et piaffer d’impatience concernant les suites à donner. 16/20