Gotham part d’un principe assez sympa : découvrir les origines de cette ville et des personnages emblématiques qui la marqueront. Quand on sait que l’univers de Batman nous propose des « méchants » tout à fait charismatiques, on ne peut que saluer l’idée.
Seulement voilà, on nous livre le tout sur une couche d’épisodes superficiels qui prennent les spectateurs mais aussi les personnages traités pour des demeurés. Gordon en tête. Non content de cracher à la figure de ce que l’adaptation cinématographique de la sage Dark Night avait réussi à créer, la série nous propose un boyscout simpliste et bête comme ses pieds. Certes, il est mignon, et c’est là la seule qualité que l’on peu lui associer. Seulement voilà, Jim Gordon, l'original, n’est pas connu pour sa beauté, mais plutôt pour son sens de la justice, isolé dans une ville envahie par le vice. L’enjeu qui nous est vendu est alors de déraciner la corruption de la ville. C’est bien beau, mais quand on voit que tous les deux épisodes, Jim met plus que les orteils hors de la légalité, c’est diablement hypocrite. Si à la limite cette adaptation s’y prêtait bien, on tolèrerait cela. Seulement voilà, notre Gordon est une véritable girouette qui ne sait pas ce qu’il veut entre le bien et le mal, tellement que sa vision manichéenne des choses se cantonne à une bêtise hypocrite sans limite. On ne croit pas une seule seconde qu’un type qui, après avoir compris (et miraculeusement survécu à cette révélation) que le monde était gris, fait un marché avec la mafia quand ça l’arrange lui et s’en sorte avec tous ses doigts. Alors oui, des fois, il règle sa part du contrat et on a droit à un cas de conscience. Un schéma qui se répète d’ailleurs… jusqu’à la prochaine fois. Jim demande de l'aide à un gangster puis rempli sa part du marché (ou pas), et quelque soit sa décision, le regrette plus tard. Systématiquement, des schémas se reproduisent et lassent. Tellement qu’on est capable de prévoir « l’évolution » de Jim à partir d’une scène sur au moins trois épisodes. Le plus simple reste aussi de voir ce que sa relation amoureuse lui dit en lui donnant son avis sur un problème ainsi que sa théorie sur les conséquences pour Jim s’il ne l’écoute pas. On peut être sûr que ces prédictions se vérifient quasiment tout le temps. On en vient au point où les scènes où Jim se prend des coups nous détendent plus qu’elles nous horrifient.
Les histoires avec Bruce et Alfred nous servent la même chose avec un Bruce tout innocent mais gourmand de justice confronté à une réalité à laquelle il ne peut PAS faire face de par son âge et son inexpérience. Heureusement qu’Alfred est là pour son humour british et pour son talent militaire… attendez… ne serait-ce pas ce qui se passe à chaque fois ? Sans parler de ces « leçons » soit disant apprises à la fin de chaque mésaventure et qui prennent soin d’être oubliées pour enclencher l’arc narratif suivant. Cela produit des personnages soit fades soit complètement stupides incapables d’évoluer. D’autant plus que la série nous livre une série de clins d’œil sur l’avenir radieux et héroïque de Bruce sans jamais vraiment aller dans cette direction. On peut également en profiter que certains « clins d’œil » ressemblent plus à des coups de massue bourrins que des références subtiles et intelligentes. Clairement, ces adjectifs ne sont pas visés par la série.
Maintenant, tout n’est pas à jeter. Certaines adaptations de personnages sont plutôt réussies et réellement sympathiques comme le Pinguin et monsieur Ed Nygma (en scientifique pour la police tout simplement génial et drôle). La future Catwoman est également amusante de même que la décalée Ivy. J’ai notamment apprécié l’histoire des origines de l’épouvantail qui donne l’impression d’avoir subi un VRAI travail d’écriture. Toutes ne sont pas aussi crédibles, comme notamment un Victor Fries qui n’arrive pas vraiment à exprimer ses enjeux dramatiques (Schwarzenegger y arrivait bien mieux). Autres note positives : les décors et les lumières créent des ambiances qui, elles, pour leur part, sont plutôt fidèles à l’esprit Gotham City. De même que les costumes correspondent magnifiquement aux personnages qui les portent.
Bref, Gotham se concentre sur un fan service raté et très souvent bâclé auquel on ne croit pas tellement. Elle rejoint les rangs de ces séries agaçantes (à la Once Upon a Time) qui nous présentent des personnages redondants qui n’évoluent pas en même temps que le spectateur dans le seul but d’utiliser un univers connu et apprécié. Seulement voilà, l’indigestion arrive vite et la série finit même par réussir un véritable tour de force en nous dégoûtant de cette ville fictive à la mythologie pourtant fascinante et géniale. Utiliser (saccager) un matériau de base mythique ne suffit pas à faire une bonne série, il faut que son rythme soit cohérent, il faut de l’originalité, des personnages avec des personnalités marquantes ET convaincantes. Le spectateur un minimum informé sur l’univers de Batman sait que la plupart des personnages vivront jusqu’à ce que Bruce devienne adulte. A partir de là, les enjeux de suspense sont pratiquement absents et il faut absolument un scénario bien rôdé pour assurer le show. Ici… ce n’est pas le cas. Et de toute manière, quand une série nous présente des personnages qui nous agacent sans le vouloir, c’est qu’il y a un gros problème d’écriture.
Je suis généralement très tolérant et patient avec une série, mais j’en suis arrivé à un point, dans la saison 2, où je devais arrêter l’épisode tellement la série m’exaspérait. Étant véritablement amateur de l’univers de Batman, je pense y revenir plus tard et peut-être que ma critique sera alors nuancée, mais pour l’instant, cette série n’est que poudre aux yeux. Une jolie poudre, certes, mais rien d’autre, et surtout à consommer à très petites doses.