Ouaouh ! Qu'attendions-nous vraiment d'un spin off de l'excellentissime série "Breaking Bad", sinon un peu de "fan service", comme on dit aujourd'hui, autour d'un personnage secondaire pittoresque ? Et nous voici devant une première saison du même niveau que les dernières saisons de "Breaking Bad" (c'est dire la qualité !), avec la même intelligence de mise en scène, au service d'une construction narrative complexe, racontant des histoires à la fois triviales et exemplaires (pour le "mythe", on n'y est pas encore tout-à-fait...) arrivant à des personnages bouleversants d'humanité. Bien sûr, il n'y a pas - pour le moment - dans "Better Call Saul" le côté "ludique", vaguement cartoonesque (du côté des Frères Coen, comme on l'a souvent dit) du périple ultra violent de Walter White : on a plutôt droit ici à une balade mélancolique, puis très vite extrêmement douloureuse, où le burlesque n'affleure qu'à de rares moments de respiration, tournant autour du métier d'avocat, décrit ici avec une justesse rare, évitant la plupart du temps la caricature que l'on pouvait craindre. La similarité avec "Breaking Bad" est plutôt dans le thème, puisqu'on suit ici le calvaire d'un homme ordinaire, plutôt honnête malgré ses tendances ludiques à la mini arnaque, qui va encaisser pendant ces dix premiers épisodes une série épuisante d'humiliations, de défaites, puis de trahisons (l'avant-dernier épisode, chef d’œuvre absolu, est littéralement terrible !), au point de baisser les bras et de se laisser aller dans un final faussement libérateur ("Smoke on the Water" !) et véritablement désespérant. Jimmy McGill, magnifiquement incarné par Bob Odenkirk, devient au fil de son calvaire, un véritable frère d'épreuve pour le téléspectateur empathique, qui souffrira donc avec lui à chaque coup du destin. Heureusement, Vince Gilligan et Peter Gould ont la générosité de relâcher un peu la pression et de pimenter leur série avec les aventures "policières", plus dramatiques peut-être, mais aussi plus "amusantes" de Mike Ehrmantraut, plus conformes sans doute à ce qu'on attendait de l'équipe de "Breaking Bad"... Au final, même si "Better Call Saul" a pour le moment moins de potentiel commercial que "Breaking Bad", et si certains pourront renâcler devant la minutie patiente avec laquelle la narration avance, cette première saison est une réussite exceptionnelle.