Merde alors...maintenant que Vince Gilligan m'a déçu je ne sais plus trop en quoi croire. Je ne commet pas l'erreur de m'attaquer à "Better Call Saul" en espérant le même niveau d'excellence que "Breaking Bad", qui représente pour moi la perfection cinématographique, puisque pour le coup ce n'est absolument pas l'ambition de Gilligan qui le dit lui-même: là où BrBa était plutôt 75% drame et 25% humour, le réalisateur entend faire de ce spin-off l'inverse, ce sont ses mots, donc les allures de grande et puissante tragédie de "Breaking Bad", pas de ça ici. Tout mon problème (enfin, une bonne partie) c'est que vu la manière dont la série se prend au sérieux, j'ai l'impression que Gilligan se perd dans ses intentions. Le ton de la série reste encore à déterminer, il est en tout cas bien moins drôle que ce que le réalisateur avait annoncé (de moins en moins au fur et à mesure). Alors qu'une satire sociale bien grinçante aurait été bienvenue compte tenu du nouveau contexte -et personnage principal, on en retient surtout des instants de mélancolie très BrBa pour le coup, omniprésents mais loin d'être aussi forts, la faute à un manque de substance. Si un peu de "Breaking Bad" subsiste pour le pire ou le meilleur comme dans les dialogues qui s'égarent à droite et à gauche, ou dans la lenteur emblématique du rythme de la série (qui pourtant, savait décoller quand il le fallait), voire quelque part dans l'esprit original (le show pourrait parfois s'appeler "Breaking Bad" vu à quel point tout ce qui peut déraper dérape de la pire manière qui soit), globalement la substance de la série, ce qui faisait sa superbe, a disparu: plus de développement de personnages ni de relations pour porter la série puisque même Saul Goodman est sous-exploité, plus de moments forts ni mémorables, plus de personnages mémorables hormis les vétérans de BrBa (où est passé Nacho Verga tout ce temps ? Moi qui me réjouissait de voir Michael Mando...), plus de ces liens logiques géniaux pour relier les événements -la série ne s'embêtant pas à créer un univers dense, et plus de ce talent pour extraire une beauté métaphorique du contexte (dans BrBa c'était la science, ici on a surtout droit à un jargon juridique dur à avaler). Et ne croyez pas que je reproche à la série de ne pas être "Breaking Bad" ni que je me met des œillères tout seul, je partais vraiment confiant et j'ai trouvé la série de très bonne facture à son lancement: durant les premiers épisodes le ton est en effet davantage dans un humour cynique à souhait et tous les éléments, s'ils venaient à se concrétiser, laissaient espérer le meilleur. Sans parler de l'interprétation unanimement excellente et du fait que Vince Gilligan est sans doute meilleur encore à la réalisation que pour son précédent bébé, on sent dès le pilote l'assurance gagnée au fil des saisons de BrBa. Et puis -cela concerne toute la saison- pour un spin-off faisant suite à un monument d'une telle ampleur et renommée, le fan-service reste quand même très raisonnable, et puis ce n'est pas le mal absolu non plus. Or plus les épisodes s'enchaînent lors de cette première saison, plus les sous-intrigues et péripéties s'enchaînent sans une véritable colonne vertébrale pour relier le tout, plus j'ai de mal à trouver un véritable sens à "Better Call Saul", qui me laisse l'impression d'enchaîner les fioritures sans se consacrer à quoi que ce soit de durable, même si ce n'est pas du tout une série d'anthologie. Une première saison entre quête d'identité et maladresses toutes bêtes.