Après une première saison vraiment novatrice dans le genre, HBO a relancé la série pour une seconde saison. Une seconde saison décriée et décevante pour certains, que j'avais tout de même hâte de regarder. Si le résultat n'est pas à la hauteur de la première enquête, il reste néanmoins convaincant.
Tout d'abord, le scénariste et créateur de la série Nic Pizzolato n'a pas eu le temps de rédiger un récit de qualité, la trame scénaristique est alors confuse et fouillie. En effet, à cause de la production trop rapide voulue par HBO, l'enquête que mène les trois détectives Ray Velcoro, Antigone Bezzerides et Paul Woodrugh se perd dans des conflits politiques et financiers de la ville fictive de Vinci. L'histoire est compliquée à suivre dans son ensemble, malgré des explications plus ou moins claires et évidentes. Heureusement, la résolution ne se montre pas totalement prévisible (en effet j'ai vu le coup venir à l'avance). Venons donc aux personnages : Ray Velcoro, flic corrompu et meurtri à cause de ses problèmes familiaux est un homme déjà vu dans le genre du polar. Ses problèmes sont classiques, tout comme son alcoolisme. Cela n'empêche toutefois pas au personnage d'être attachant, cela grâce à la très bonne performance de Colin Farrell ("Prémonitions"). Son charisme et sa prestance sont efficaces. Antigone Bezzerides est quant à elle interprétée par la belle Rachel McAdams ("Il était temps"). Si son rôle est un peu effacé, il reste agréable à suivre sans égaler Ray. Paul Woodrugh, ancien soldat torturé, porte le charme de Taylor Kitsch ("John Carter") mais ne parvient pas à être utile au récit. En effet, ce détective est sous-exploité, pas assez mis en avant et à mon grand regret car il dégageait une part mystérieuse intéressante à l'égard de son passé. Ces 3 détectives forment donc un trio qui se laisse suivre, mais sans égaler la grandeur du duo McConnaughey-Harrelson. Vince Vaughn ("Les Stagiaires") nous prouvent quant à lui qu'il peut jouer des rôles variés. Frank Semyon, ancien malfrat devenu entrepreneur, est tout aussi fascinant à suivre que Ray Velcoro. Son personnage est développé, suffisamment pour que l'on s'attache. La prestation de Vince Vaughn est excellente, nous offrant même des séquences d'une forte intensité. Kelly Reilly ("Eden Lake") est quant à elle sa superbe femme. Elle est belle, souriante et toujours sensée. L'actrice est aussi très convaincante dans son rôle. Les problèmes de chacun sont en soi intéressants à suivre, mais leur regroupement dans une enquête bordélique atténue les sentiments que l'on aurait pu éprouver si la production avait été plus souple avec le scénariste.
Ensuite, la forme est toujours heureusement aussi magnifique. Débutant sur un générique graphiquement supérieur au premier accompagné par la musique "Nevermind" de Leonard Cohen, la série est toute aussi esthétique. Cependant, n'ayant plus un unique et seul réalisateur mais plusieurs, cette seconde saison ne fait preuves que de quelques fulgurances remarquables. La réalisation ne se suit pas toujours dans ses cadrages. La tension est forte et présente durant certaines séquences, mais le reste ne fait preuve de dramaturgie ou de violence, les personnages ne faisant que discuter. Certains plans, symboliques et parfaitement orchestrés, sont heureusement forts en émotions et pensés. Les mouvements de caméra sont majoritairement fluides, bien composés ; les décors de la Californie sont parfaitement exploités. Les autoroutes et les entrepôts de Vinci sont superbement filmés par hélicoptère, les prises de vue enchantent. L'ambiance est certes moins immersive pour cause de quelques longueurs (le premier épisode n'est par exemple qu'une longue exposition des antihéros), mais elle reste par moments poisseuse, dépressive et très plaisante. Les conflits politiques sont nombreux, les faces à faces aussi, de même pour les fusillades ; la série regorge quand même de surprises.
Enfin, la bande originale est assez décevante. Celle de la première saison était bonne, variée et entrainante, alors que celle de cette saison-ci ne se fait remarquer. Si l'on retient les musiques de Lera Lynn (personnage à part entière) qu'elle interprète magnifiquement qui accompagnent le visuel avec beauté et féérie, le reste n'est que des instrumentaux orchestrés par T Bone Burnett qui ne marquent pas.
En conclusion, cette seconde virée dans les différentes magouilles politiques de "True Detective" ne se montre pas aussi complète que la première, et moins philosophique. Nic Pizzolato a été pris par le temps et a écrit un récit certes assez intéressant mais confus, inabouti. Heureusement les acteurs font avec et se débrouillent très convenablement, de même pour la mise en scène et la mise en image. J'espère que la saison suivante relèvera le niveau, et que HBO aura compris ses erreurs scénaristiques et de planning.