Le nouveau chef d'oeuvre de HBO n'a pas comblé les attentes qu'avait généré tout ce bouche à oreille dithyrambique à son sujet, en ce qui me concerne. Ok la narration est astucieuse, alterner les flashbacks et les flashforwards rend le tout assez fluide (même si vers la fin les va-et-viens peuvent s'avérer poussifs). Ok la réalisation est plus cinématographique que celle de bon nombre de film, et la photographie apporte un certain cachet aux vastes paysages du bayou, aussi crasseux et fascinant que le monde dépeint par la série. Ok le jeu des comédiens vole haut, en particulier en ce qui concerne Matthew McConaughey même si Woody Harelson a plus l'occasion de sortir de ses gonds et donc de jouer sur plusieurs tableaux, ce qu'il fait comme un chef. Et Ok le générique, dans la plus pure tradition HBO, est plutôt sublime graphiquement et musicalement, et d'ailleurs la B.O. est pas mal non plus dans l'ensemble. Reste que l'écriture, elle, est quasiment à l'opposé de ce que j'attends d'une série. Déjà il y a une règle de base au cinéma et dans toute forme d'art c'est "ne dites pas, montrez" et le moins qu'on puisse dire c'est que cette série s'en balance, "True Detective" opte donc pour quelque chose que je considère comme une mauvaise écriture (mais ce qui n'est pas le cas de tout le monde), à savoir balancer tel quels les idées que l'auteur souhaite faire passer (via les longs et nombreux monologues existentiels de Rust), là où elles devraient selon moi être lisibles en filigrane, dans une seconde lecture. C'est quelque chose que je n'aime pas trop d'une part parce que ça me paraît plus grossier qu'autre chose, l'auteur a manifestement plein de choses à dire mais ce n'est pas pour autant qu'il faut tout dire, et d'autre part parce que même si les personnages paraissent du coup consistants, il y a quelque chose qu'ils ne paraissent pas du tout être: humains, vu que ce genre de discours fait tout sauf naturel. Ils ont juste l'air d'être les porte-paroles de l'auteur mais on sent difficilement qu'ils existent au-delà, ils ne me donnent pas l'impression d'être des personnages tri-dimensionnels ni finis. Enfin je dis « ils » mais c'est surtout Rust qui sert les grands discours de l'auteur, Marty donne déjà plus l'impression d'exister pour autre chose. C'est pourtant une « faute » qui se retrouve dans pas mal de mes films favoris, "Fight Club", "99 Francs", "Lord of War" ou plus ou moins n'importe quel film de Christopher Nolan pour ne citer qu'eux, mais dans ces films la pilule passe bien mieux, peut-être parce qu'ils durent deux heures et non pas huit. Peut être aussi parce qu'à côté, l'intrigue n'avance pas à dos de chameau comme celle de cette série. Pour quelques morceaux de bravoure pas mous du genou, je me suis quand même beaucoup fais chier à regarder cette série. Le faible nombre d'épisodes m'a poussé à continuer (ça et l'impression après l'épisode 4 que la série gagnait un second souffle, mais en fait non) mais j'ai eu très souvent -sinon sans arrêt- eu l'envie de mettre un bon coup de pied aux fesses du déroulement du scénario, la faute aussi à des enjeux dramatiques pas toujours très clairs. Et le fait qu'un ou deux épisodes auraient presque pu être totalement coupés sans que l'intrigue n'en devienne impossible motive mon avis que "True Detective" est bien trop long pour ce qu'il raconte et aurait gagné à être un film de deux heures voire deux heures trente, mais certainement pas une première saison de huit heures qui fait du sur-place comme elle le fait, et qui à mon sens n'est pas une si bonne étude de caractère que l'on veut bien le dire.