The Fall marque le retour gagnant, sur petit écran, de Gillian Anderson, la consécration, qu’importe ce qui viendra ensuite, pour un certain Jamie Dornan et une nouvelle réussite pour la BBC Two, chaîne qui livre également l’excellente Peaky Blinders. Show policier parfaitement structuré, le face à face entre une commissaire de police et un tueur en série, orchestré par Allan Cubitt, en cinq épisodes, affaire à suivre, fait preuve d’une remarquable intelligence d’écriture. Voyage à Belfast, donc, on la police locale, avec l’appui d’une carrure londonienne, doit faire face à un étrangleur fétichiste, un monstre de sang froid qui partage à 50/50 l’affiche avec sa poursuivante. L’enquête policière, d’une part, parfaitement documentée, parfaitement logique, partage le tableau avec la psyché défaillante d’un tueur de sang-froid, un individu qui assouvi sa curieuse dépendance dans une ville qui saigne encore de toutes les blessures d’une guerre d’indépendance endormie mais prête à refaire surface. Le contexte, en lui-même, est déjà remarquable.
The Fall fonctionne aussi bien, outre du fait de son scénario acéré, de par les présences de Gillian Anderon, parfaite de froideur, qui démontre aussi bien toutes ses forces que ses faiblesses morales dans la peau d’une femme forte mais parfois faible face à ses tentations, et d’une Jamie Dornan parfait. L’acteur, qui explose ici dans la peau d’un psychopathe, oriente son personnage vers un dilemme moral qui penchera, quoi qu’il fasse, vers sa nature destructrice. Qu’importe le monstre, ce dernier reste touchant, ne semblant pas combattre contre ses pulsions mais tentant toutefois d’épargner sa famille. La chasse est lancée, les deux fortes têtes se font face, à distance, jusqu’à un rapprochement final qui promet une deuxième saison de haute volée. Tout est parfaitement maîtrisé, chorégraphié, documenté, ce qui donnera lieu à un suspens permanent, d’une régularité narrative exemplaire.
Sans chercher l’ellipse, sans s’égarer sur des chemins de traverses, le format cinq épisodes d’une heure ne le permettant pas, Allan Cubitt affronte frontalement la dramaturgie de son projet, n’envoûtant jamais son public pour le tromper sur la marchandise mais le confrontant sans détour à cette chasse à l’homme ou l’on ne discerne parfois pas très bien qui est la proie, d’où un certain attrait. Les faiblesses de l’homme, qu’importe sa position sociale, sa posture, son charisme, son parfaitement intégrée à l’intrigue, une intrigue sur laquelle plane un climat explosif, comme mentionné, propre à la capitale nord-irlandaise. Ou soulignera, en parlant de Belfast, que nous ne discernons qu’assez peu la différence entre police et police indépendante, une spécificité locale qui ne nous est pas commune et qui brouille parfois les pistes.
Remarquable show policier, donc, qui se caractérise de par une rigueur narrative de tous les instants et qui fait la part belle à la psychologie de ses personnages. C’est réaliste, tranchant et ça retrouve dans la longue liste des séries policières, quelques réussites du même genre. On pourrait certes repasser pour l’originalité du show, mais cela reviendrait à condamner un superbe exercice de style sans en faire réellement le tour. On attend donc de pieds fermes la suite des débats. 16/20