SPOILERS !!!
J'aimerais commencer par la grande qualité de certains éléments de cette série. Tout d'abord, les deux rôles principaux masculins sont brillamment portés par deux acteurs talentueux qui forment un merveilleux duo. Mads M. incarne un Hannibal glacial autant que doux, beau autant que laid. A la manière de Dracula, il plaît aux spectateurs autant qu'il les répugne. Ensuite, le travail du son et de l'image est absolument succulent. Dans les premières saisons, les crimes que nous suivons sont à la frontière entre horreur et art. C'est purement passionnant. La noirceur des personnages est pleinement exploitée et retranscrite tantôt à travers des personnages radicaux, tantôt à travers des personnages plus ambivalents tels que Will, auquel le spectateur peut davantage s'identifier. La mise en avant de la Cuisine devenue un réel art culinaire est très intéressant également et reflète cette beauté qui existe dans l'horreur, ou parfois cette horreur dans le Beau. Plonger les personnages dans un hiver éternel accroît l'atmosphère lugubre et sans issue du récit. Hannibal est très certainement une série travaillée, avec talent.
Cependant... car il y a un cependant, et il est de taille je le crains.
Je déplore des choix qui viennent entacher assez fortement et radicalement les qualités citées précédemment. L'utilisation redondante des flash-backs est si récurrente qu'elle en devient abjecte. Certains personnages ne sont pas suffisamment travaillés et sont réduits à alourdir un récit déjà lourd de noirceur, je songe notamment au Dr. Bloom qui n'impacte que peu le récit, et qui n'apparaît presque que pour des dialogues sans conséquence. Si la psychologie des personnages est mise en avant tout au long des épisodes, nous ne parvenons malgré tout que péniblement à entrevoir la psyché de ceux-ci. Cette opacité rend certes compte d'une complexité humaine, mais perd les spectateurs par une espèce d'overdose de ce schéma : ne jamais comprendre/savoir ce qu'il se passe réellement ou ce qui est imaginaire. Jusqu'à la fin de la deuxième saison, ces défauts passent au second plan ; la qualité narrative et visuelle prenant le dessus, nous restons captivés par ce qu'il se passe à l'écran.
Malheureusement, la troisième saison perd radicalement en qualité, du moins c'est le cas pour la moitié de celle-ci. De longs dialogues inutiles, des événements restés sans réelle explication (que fait le Dr Du Maurier avec Hannibal ?), des effets visuels qui frôlent l'exagération (les raccords plastiques sont bien trop utilisés et perdent de leur impact jusqu'à devenir indigestes), des personnages principaux devenus subitement secondaires et vice-versa, les personnages changent tous de comportement sans raison (à part Hannibal qui reste fidèle à lui-même), etc. Puis, le ton change en milieu de saison. Nous retrouvons un schéma apprécié, les personnages tels que nous les connaissions, un lieu connu. Cela a pour effet de confirmer que l'on se perd pendant 7 épisodes qui semblent tirés d'une autre série, et qui ne nous sont pas réellement très utiles dans le récit. Condensez ces épisodes en deux maximum, et la série retrouve un peu de sa qualité originelle. La deuxième moitié de la troisième saison est un pur délice. Le final est vraiment réussi !
Finalement, cette série n'est pas mauvaise mais elle peine à garder le rythme soutenu imposé au début de la première saison, et finit par se perdre à la troisième saison. Malgré ses immenses qualités, les défauts récurrents et plombants ne permettent pas à Hannibal de s'élever au rang des grandes séries telles que Ripley (2024). Elle n'est pas si oubliable, ni si mémorable. En un mot : dommage.