"American Gods" est une série prometteuse qui pour l’instant maîtrise parfaitement son ambiance, son scénario et sa narration. Oui, il faut regarder cette série qui est un road trip halluciné et hallucinant. En huit épisodes, "American Gods" parvient toujours à maintenir son ambiance poisseuse, crue, hallucinée et teintée d’humour noir, un exercice sublimé par une bande originale extraordinaire signée Brian Reitzell. De même, après l’excellent "Hannibal", Bryan Fuller nous prouve une nouvelle fois qu’il maîtrise la mise en scène. Le spectateur se laisse entraîner par une photographie superbe et des séquences aux allures de trip sous acide. Même les scènes de sexe, pourtant très codifiées par la télévision américaine, sont ici présentées sous un jour inattendu. Si vous avez été surpris par la première apparition de Bilquis, ce n’est rien en comparaison de la suite. Finalement, seul le rythme de cette série est inégal. Si la série se veut être un road trip rêveur à travers les États-Unis, elle connaît une baisse drastique de rythme lors des quatrième et cinquième épisodes, avant de revenir au rythme initial, comme si les showrunners voulaient faire souffler le spectateur. Mais la véritable force de cette série, c’est sa liberté de ton. Le néophyte, qui découvre l’univers créé par Neil Gaiman avec le show, s’embarque dans un road trip halluciné, allumé et sanglant aux côtés de Shadow Moon, ex-prisonnier et nouveau compagnon de route de M. Wednesday, son énigmatique employeur qui est en réalité un Dieu en quête de vengeance. Ce dernier cherche à réunir les anciennes divinités, telles que Czenorbog (déité slave du mal) ou le Leprechaun, pour conduire une guerre contre les nouvelles idoles humaines que sont les médias, la nouvelle technologie, ou la mondialisation. Et le spectateur n’est en rien épargné par la série, que ce soit avec les parties de jambes en l’air (comme je vous en parlais plus tôt), par une narration en pointillé ou par l’hémoglobine qui coule par hectolitres. Pour ceux qui ont dévoré les 700 pages du roman éponyme qui a inspiré la série, c’est l’occasion de découvrir les libertés prises par les showrunners par rapport à l’œuvre originale, sous le regard bienveillant de Neil Gaiman. En effet, le format sériel permet d’avoir les coudées franches en matière de créativité. Voilà pourquoi Neil Gaiman a toujours refusé les adaptations cinématographiques de son bébé. Il juge "American Gods" bien trop dingue et volontairement inadapté au grand écran. La présence de Laura Moon à l’écran pour commencer est un bon exemple de cette liberté créatrice. Autre exemple marquant, l’apparition de divinités qui ne sont pas dans le livre, telles que Vulcain, dieu de la forge reconverti en déité des armes à feu. Vous l’aurez compris, il faut regarder cette série télévisée américaine, vraiment très bonne, tant pour sa narration, son ambiance et sa mise en scène, que pour sa relecture du roman de Neil Gaiman