Après avoir passé ses premières années à Calzada de Calatrava, Pedro Almodóvar déménage avec ses parents à l'âge de 8 ans (un doute plane encore sur sa véritable année de naissance) en Estrémadure. Issu d'une famille relativement pauvre de muletiers d'une région ravagée par la Guerre d'Espagne, il grandit entouré de femmes, ce qui ne sera pas sans conséquence sur son cinéma. Élève particulièrement doué, il étudie chez les Pères Salésiens et les Franciscains, une expérience douloureuse qui lui fera perdre la foi et motivera une certaine aversion pour la religion. Pour se détendre et sortir du carcan stricte de cette éducation, il fréquente assidûment les salles obscures.
A 17 ans, Pedro Almodóvar. part pour Madrid, seul, sans argent et sans travail, avant d'entamer un tour d'Europe qui le mène à Londres et Paris. Il souhaite ainsi apprendre le cinéma, mais, sur ordre de Franco, l’École Officielle du Cinéma vient de fermer ses portes. Après plusieurs petits boulots, il décroche un emploi de bureau à la Compagnie nationale de téléphone espagnole où il reste douze ans. Parallèlement, il écrit des scénarii, tourne, de 1974 à 1979, des courts-métrages en Super 8, fait la connaissance de Carmen Maura, ce qui l'entraîne à faire du théâtre au sein de la troupe indépendante "Los Goliardos" (au sein de laquelle il montre un goût certain pour le travestissement), et fonde un groupe punk-rock parodique "Almodovar y McNamara".
Avec l'arrivée de la démocratie en Espagne, il réalise, sur une période d'environ un an et demi, son premier long métrage Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier. Un film tourné en 16 mm, avec un budget dérisoire, et qui marque sa première collaboration avec l'actrice Carmen Maura. Alors que le mouvement culturel la Movida se développe, il tourne Le Labyrinthe des passions et Matador qui révèlent Antonio Banderas. Scénariste et réalisateur, il ajoute une corde à son arc en 1986, en fondant avec son frère Agustin Almodovar (qui abandonne sa carrière d'ingénieur en chimie pour produire des films), la société de production El Deseo (le désir). Le premier film produit par la société est La Loi du désir (sixième long métrage du cinéaste) en 1987. Par la suite, ils produiront tous les films réalisés par Pedro Almodóvar. Ce dernier prouve qu'il peut être omniprésent sur un projet en enfilant également les costumes de chef décorateur et de compositeur. A l'instar de son frère, il lui arrive même de faire quelques apparitions hitchcockiennes dans certains de ses films, comme dans La Loi du désir.
Baroque, adepte du kitsch et de la parodie, Pedro Almodóvar se fait un nom au-delà des frontières espagnoles avec Femmes au bord de la crise de nerfs, en 1988. Le cinéaste se montrant fidèle à ses acteurs, son cinéma est truffé de figures récurrentes, parmi lesquelles Carmen Maura, Victoria Abril, Penélope Cruz, ou encore Antonio Banderas, seule icône masculine de la filmographie de ce "réalisateur à femmes". Ce dernier se montre également assidu à Cannes, qu'il visitera à six reprises : 1992 (membre du jury), 1999 (en compétition avec Tout sur ma mère), 2004 (La Mauvaise éducation projeté en ouverture), 2006 (en compétition avec Volver), 2009 (en compétition avec Etreintes brisées) et 2011 (en compétition avec La Piel que Habito).
Avec Tout sur ma mère, qu'il dédie à sa mère, Pedro Almodóvar rafle un nombre impressionnant de prix : Prix de la mise en scène à Cannes, Oscar et César du Meilleur film étranger, Golden Globe et même sept Goya ! Trois ans après, il récidive avec Parle avec elle, et fait mieux encore : Oscar du Meilleur scénario, cinq prix EFA, deux BAFTA, le Nastro d'Argento, le César et beaucoup d'autres prix partout de par le monde, exception faite de l'Espagne. En 2004, il a l'honneur d'ouvrir la 59e cérémonie du Festival de Cannes avec sa Mauvaise éducation, une première pour un film espagnol. Avec ce film intimiste rappelant l'adolescence du réalisateur chez les Franciscains, il révèle un nouveau talent en la personne de Gael Garcia Bernal.
Deux ans plus tard, sa nouvelle comédie dramatique, Volver (portrait presque autobiographique de trois générations de femmes au sein de la classe ouvrière), lui permet de retrouver après 17 ans d'absence sa première égérie, Carmen Maura. Il réalise ensuite un rêve, en tournant à Lanzarote Les Etreintes brisées, île découverte pour la première fois par le cinéaste quelques mois après la mort de sa mère. Comme bien souvent au cours de la carrière du réalisateur, cette parenthèse nostalgique est suivie d'un film sombre : le thriller La Piel que Habito. Alternant les registres, c'est avec une comédie "aérienne", Les Amants passagers, qu'il revient deux ans plus tard.
En 2016, son 20ème long métrage, Julieta, évoque des thématiques qui lui sont chères comme celles du destin, de la culpabilité et de cette force mystérieuse et insondable qui nous pousse à quitter les personnes que nous aimons.