Evil Dead premier du nom est une des expériences cinématographiques les plus terrifiantes que j'ai jamais vécue. Mais même réfugié à dix mètres de l'écran et recroquevillé sur un fauteuil, paralysé de peur, je saisissais quand même quelque chose que l'on retrouve étrangement (ou pas d'ailleurs) dans les films les plus traumatisants de Sam Raimi (je pense au récent Jusqu'en enfer, dont la découverte en salle à 12 ans alors que je n'avais vu qu'une poignée de pseudo films d'horreur m'a causé une trouille monstre et des cauchemars en rafale durant les nuits qui suivirent) : il y a un aspect comique. Second degré, mais presque « second degré bon enfant ». Le réalisateur s'amuse comme un gosse à nous servir ses bon petits plats baveux et dégoulinants d'hémoglobine crasseuse, selon son adage spécial Evil Dead 1 : « the gorier, the merrier ! ». C'est parfois même si drôle qu'on se retrouve en train de rire sous l'effet de la peur, la respiration bloquée, ce qui rend un peu comme une sorte de sanglot joyeux. Hum hum, bon je ne vais pas m'attarder là dessus, mais il y a des choses à creuser de ce côté là, c'est sûr...Donc voilà que débarque Evil Dead 2, que les fans considèrent d'ailleurs comme supérieur au premier opus, et comme un remake parodique. Qu'ils aient raison ou pas, à vous de choisir, reste que ce deuxième Evil Dead est un très bon film et surtout une très bonne suite. Pourquoi ? Parce que Raimi a choisit l'option la plus intelligente pour donner suite à un fleuron de l'horrifico-gore, soit le pastiche. Vous en connaissez beaucoup des films d'horreurs qui amenèrent des petites révolutions dans leur monde, dont la suite peut être qualifiée de décente ? Halloween, Vendredi 13, Freddy...si l'on gratte vers les petits budgets, ils ont tous étés bafoués par une série d'épisodes ressemblant à des produits dérivés et ne cessant de s'étendre dans la médiocrité. Pour les grosses production, c'est différents, il y a Alien 2 et quelques autres, mais le contexte aussi est différent...Donc Evil Dead 2 est une des rares suites réussies ayant d'étroits liens avec son prédécesseur (parce que oui j'allais l'oublier il y a Zombie de George Romero, mais la saga des morts vivants relève davantage d'un succession de thèmes liés que d'une trame plus ou moins suivies par les même protagonistes). Et rien que pour cela on ne peut que l'applaudir. Déjà il y a...ahhhh....Bruce Campbell encore plus top que dans le premier Evil Dead...c'est pas dur à comprendre, il était déjà responsable d'une bonne dose de comique, dans toutes ses interviews il scande qu'il adore par dessus tout jouer dans des comédies, bref il est sur son territoire et nous livre une version multi-déjantée d'Ash, tout en insistant sur l'humanité bébête du personnage ! Mais mieux encore, Evil Dead 2 propose un regard plutôt délirant sur le genre horrifique-épouvante-gore en général. Les effets surnaturels pour amener la tension sur la pente ascendante sont parodiés jusqu'à plus soif, ma préférée reste la scène où tout les objets se mettent à bouger en tentant d'effrayer Ash, à se mourir de rire. L'Exorciste se fait moquer dans les grandes largeurs, les effets minimalistes sont amplifiés de manière à les rendre grotesque et idiots. L'horreur a outrance nous est balancée à toute berzingue lors de séquence véritablement anthropologique (la scène de la main !). Le gore abonde à foison, le plus souvent passé au crible de kitsch et du ridicule total (« I am ready ! »). Les effets spéciaux mâtinés à la Ray Harryhausen nous proposent un version Beetlejuice des fameux morts-vivants, les créatures déploient leur bestiaire varié au service d'une jubilation éprouvée non stop face à cet Evil Dead 2. Mais rassurez vous, derrière tout ça il y a une histoire, pas piqué des verts, du fantastique à l'ancienne justement, moi qui parlait de Harryhausen, c'est linéaire et enfantin au possible, mais le rythme très élevé ne laisse aucune place à l'ennui, la distraction fonctionne à plein régime, on ne prend pas le temps de souffler, les 1h25 étant remplies à raz bord ! Surtout qu'au de-là de tout ce que je viens d'écrire, sur les rapports entretenus avec le précédent Evil Dead et le déblayage sur le film d'horreur en général, le film s'offre une pure et fascinante frénésie formelle guidée par l'habile main de Sam Raimi qui laisse sa caméra partir en roue libre, multipliant les mouvements hallucinants et gratifiant l'ensemble d'un montage plus que jouissif. La musique se case avec effacement la plupart du temps, au profit des cris sauvages et des hurlements, mais les morceaux qui pointent le bout de leur nez se révèlent dantesque et ponctué de note accentuant à mort la tonalité grotesque si caractéristique de ce film. Donc voilà, il suffit de l'avoir vu une seule fois pour qu'il s'imbrique dans la case « culte » de notre cerveau, et qu'on ait envie de le revoir en boucle des dizaines de fois. Et sinon qu'est-ce qu'on dit à la fin d'Evil Dead 2 ? Putain faut qu'je commande la suiiiiiite !!!!