Alors là, attention ! Je m’attaque à l’un des piliers du cinéma ! Le genre de film qui fait écrouler tout l’édifice du 7e art s’il est descendu. Et pour cause, Fenêtre sur cour reste à ce jour considéré comme l’un des meilleurs films d’Alfred Hitchcock (avec Psychose, La mort aux trousses, Le crime était presque parfait et Les Oiseaux). Et ce même s’il n’a été que nominé aux Oscars (dans les catégories Meilleur réalisateur, Meilleur son, Meilleur scénario et Meilleure photographie). Retour sur l’un des chefs-d’œuvre du cinéma à suspense, orchestré par incontestablement le maître du genre !
Pour ceux qui seraient tombés de la dernière pluie, Fenêtre sur cour pars sur une idée toute simple (un homme coincé dans un fauteuil suite à un accident qui, en espionnant ses voisins, se met à avoir des doutes sur l’un d’eux, jusqu’à le voir comme un meurtrier) mais qui donne naissance à une mise en scène complète au possible ! Qui illustre bon nombre de thèmes. Et qui fait honneur au travail de son réalisateur ! Déjà au niveau des décors. Avec Fenêtre sur cour, il n’y a pas à aller bien loin : un appartement, c’est tout ! Et de là, Hitchcock filme la façade du bâtiment d’en face où l’on aperçoit d’autres habitations, avec différentes familles, différentes personnes, différents acteurs à diriger depuis cette fameuse fenêtre. Pour dire que le tournage de ce film, avec un budget qui, de nos jours, fait rire avec tous ces blockbusters qui pullulent dans les salles (soit 1 million de dollar face à une moyenne de 150 millions pour une qualité bien inférieure).
En jouant habilement le concept du champ / contre-champ (plan du héros qui observe, plan de ce qu’il observe, nouveau plan du héros pour voir sa réaction), Hitchcock met en place tout un microcosme(le héros étant le témoin de plusieurs cas, comme la célibataire attendant le prince charmant, le couple en pleine dispute, le fêtard…). Tout un suspense qui nous rapproche de plus en plus de ce héros immobile (ce voisin, est-ce un assassin ou pas ?) qui, à cause de sa situation, reste un protagoniste impuissant (ne pouvant rien faire de lui-même, ne pouvant pas intervenir, même lorsque sa copine s’infiltre dans l’appartement du fameux voisin au point de risquer tomber nez-à-nez avec ce dernier). Et là-dessus, pas besoin de sons ou de musiques qui pètent aux tympans. La caméra représentant le point de vue du héros, il ne fait qu’observer ce qui se passe, n’entendant rien de là où il est. En nous offrant ce côté voyeur inactif face à l’action, Hitchcock nous met (comme son héros) dans l’embarras. Et ce grâce à un simple travail de mise en scène !
Revenons à la direction d’acteur ! Pas sur l’interprétation du couple vedette James Stewart / Grace Kelly, irréprochable (lui, naturel, elle, beaucoup de charme et du peps). Mais plutôt sur ce que je disais plus haut, à savoir, les comédiens que l’on voit de loin, dans leur appartement respectif. De notre point de vue (avec cette caméra qui reste à la fenêtre du héros), ils nous apparaissent comme de vulgaires figurants. Et pourtant, tous ont un rôle important à fournir. Celui de l’indifférence, de la méconnaissance de ses propres voisins. De mener leur petite vie tout en ignorant celle des autres. Jusqu’à ce que le pire arrive et là, tout le monde se rend enfin compte de tout ce petit monde qui l’entoure. Et pour cela, il fallait que chacun de ces acteurs et actrices que l’on voit de loin jouent comme s’il vivait le quotidien. Sans que le réalisateur n’ait à intervenir pour les diriger hors caméra en marche. Bref, il fallait qu’Hitchcock s’entoure de gens talentueux pour que sa mise en scène ait un sens et donne un résultat plus que concluant. C’est chose faite !
Après, comme la plupart des films du maître du suspense, cette mise en scène qui permet de tenir en haleine peut révéler quelques moments longuets qui auraient pu être raccourcis. Néanmoins, nous sommes loin du futur L’homme qui en savait trop (avec la séquence grandiose mais quasi interminable de l’opéra). Du coup, Fenêtre sur cour est bien plus accessible et facile à suivre.
Un film culte, qui aura droit à diverses versions (dont un téléfilm en 1998 avec Christopher « Superman » Reeve et le blockbuster pour ado Paranoïak avec Shia LaBeouf) et qui, bien entendu, ne l’égalisent aucunement. Je n’ai pas encore eu le privilège de voir tous les films d’Hitchcock, mais actuellement (avec Les Oiseaux, Psychose, L’homme qui en savait trop et La Corde de visualisés), Fenêtre sur cour reste le meilleur réalisateur du maître du suspense !