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Jrk N
39 abonnés
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2,0
Publiée le 17 avril 2020
Très surestimé en France, Bunuel, homme très antipathique, totalement sous la domination de ses obsessions paranoïaques dont son cinéma est l'image, est un des ces cinéastes manipulateur qui entraîne le spectateur dans des violences psychologiques cachées et qui n'en sont pas moins atroces. Ultra machiste, apparemment politiquement critique mais surtout totalement fasciné par la haute bourgeoisie suffisamment riche pour se délier des lois morales, Bunuel montre par exemple dans El (1953) avec une sorte d'admiration l'absence de scrupules d'un jaloux assassin. Ajoutez à ça une interprétation outrée, une prise de vue ampoulée et musak permanent, vous aurez un mauvais film, contrairement à ce que Lacan a voulu nous faire croire.
Avec "El", Buñuel prend le contrepied de la façon dont est habituellement représentée la justice au cinéma, par le biais d'un personnage dément qui ne sait justement plus juger de la valeur de la justice. Les avantages qui dans l'histoire sont donnés injustement au fou provoquent un sentiment de frustration qui prouve la réussite de l'oeuvre, mais qui par son vieillissement nous touche aujourd'hui plutôt de manière anxiogène. Le film a de toute évidence mal vieilli aussi du point de vue du jeu très lyrique du personnage, qu'on peut considérer comme du surjeu. Mais il faut savoir apprécier le fond sans le sortir de son contexte, et la forme présente également un curieux choix au niveau du flash back : déjà, l'utiliser était assez anachronique, mais il est en plus en plein milieu de l'histoire, de telle manière que ni on ne s'y attend, ni on le garde à l'esprit. Donc, en résumé : à considérer au-delà de son horrible aspect purement vieillot.
Les années mexicaines de Luis Buñuel sont les plus prolifiques puisqu'en neuf ans, de 1947 à 1956, il réalise 16 films soit presque la moitié de sa filmographie. "El" tourné en 1953 est une des réussites majeures de cette période avec "Los Olvidados" (1950), "Susana la perverse" (1951) et "La vie criminelle d'Archibald de la Cruz" (1955), où Buñuel affirme clairement ses obsessions derrière une mise en scène de facture classique. "El" tout particulièrement, montre que le séjour de Buñuel à Hollywood n'a pas été sans influence sur l'ampleur que le réalisateur parvient à donner à sa mise en scène que l'on peut sur ce film assimiler à celle de grands réalisateurs de films noirs mélodramatiques comme Alfred Hitchcock ("Rebecca" en 1941), Michael Curtiz ("Le roman de Mildred Pierce" en 1945), Otto Preminger ("Un si doux visage" en 1952) ou Tay Garnett ("Le facteur sonne toujours deux fois" en 1946), dans sa manière de distiller l'angoisse à travers les faits et gestes quotidiens d'un couple malade. La beauté très gracile et lumineuse de Delia Garcès n'est d'ailleurs pas sans rappeler celles de Jean Simmons ou de Gene Tierney. Certes capable de s'approprier les codes d'un genre, Buñuel n'en profite pas moins pour marquer de sa patte cette histoire de jalousie paranoïaque. Buñuel disait que sans doute Francisco Galvan de Montemayor interprété par Arturo de Cordova était celui de ses personnages dans lequel il se retrouvait le plus. On sait que le désir avait une telle importance pour Buñuel qu'il lui fallait presque à tous coups le maintenir dans l'état d'inaccomplissement pour qu'il ne s'épuise pas dans sa réalisation. Le fantasme projeté par Francisco sur la jeune Gloria (Delia Garcès) à partir de la vision de ses pieds lors d'une messe procède exactement de cette démarche irrémédiablement douloureuse car reposant sur le maintien du désir fétichiste initial par un jeu pervers où la frustration se transforme assez rapidement en torture. Tout d'abord selon un schéma classique tout est mis en œuvre pour s'approprier l'objet de son désir, que Buñuel dénommera "obscur" dans son film testament en 1977, comme l'aveu par un homme de près de 80 ans que ses efforts pour apprivoiser les ressorts de ce mécanisme aussi complexe que l'homme, ont été un échec. Dans un deuxième temps, la lutte s'engage pour maintenir intacte la sensation fondatrice du désir. Démarche bien sûr impossible car le sujet dans sa recherche égoïste du plaisir nie complètement la présence de l'autre qui ne constitue plus dès lors à ses yeux qu'un objet. C'est bien en l'espèce la spécificité de Buñuel que de sortir des lieux communs pour imposer sa vision des choses fût-elle incomprise et dérangeante. Pour ne pas rester dans l'équivoque, le réalisateur ibère qui s'assume pleinement, scande le récit d'indices qui attestent son propos. Ainsi Francisco à chaque fois qu'il est sur le point de s'unir charnellement avec sa jeune épouse trouve systématiquement un prétexte pour se dérober, accréditant l'hypothèse que peut-être l'acte sexuel n'a jamais été consommé entre les deux époux. Pour enfoncer le clou, lors d'une scène bravant adroitement la censure, l'aiguille qu'apporte Francisco avec lui quand il réveille Gloria dans un de ses délires paranoïaques indique qu'il aurait pour intention de coudre le sexe de celle-ci afin de résoudre définitivement le problème d'une pureté virginale à préserver. Ce penchant obsessionnel qu'il érigera presque en système dans sa période française où il collaborera exclusivement avec Jean-Claude Carrère pour l'écriture de ses scénarios, montre le caractère vraiment unique de Buñuel dans la grande histoire du cinéma. "El" traite tellement bien de la paranoïa que le psychanalyste Jacques Lacan se servira du film comme illustration de ses cours à Sainte-Anne. Enfin on pourra noter que la conclusion magistrale du film par Buñuel nous laissant face à l'hypothèse que revenu au calme, Francisco en résidence surveillée dans un monastère va peut-être s'enfuir pour continuer de harceler Gloria et sa nouvelle famille, préfigure avec trente ans d'avance le style visuel des slashers et autres films de serial-killer. Dérangeant, iconoclaste et en plus visionnaire, Buñuel s'en va vers hardiment vers les sommets.
Ce n’est pas du cinéma, du moins pour moi, c’est un document magnifiquement réalisé sur un cas médical précis et analysé comme le ferait un entomologiste. nous n’avons rien à critiquer mais tout à apprendre. Bien entendu Francisco reste un personnage bunuelien même s’il est universel. D’ailleurs, aucun paranoïaque très grave n’est exactement le même, le contexte compte aussi, la preuve en sera donnée à la fin du film. Nous retrouvons juste totalement Bunuel dans les dix dernières minutes, lors d’une crise plus grave encore que les autres où une part de schizophrénie apparaît. C’est un film éducatif pour celles ou ceux qui veulent bien en tenir compte. Seule la médecine et des médicaments modernes bien choisis, bien dosés et bien administrés peuvent permettre à ces patients de vivre en société. Encore faut -ils qu’ils soient protégés aussi parfaitement que Dona Espéranza le fait. Nous pouvons tous remarquer que aucun des conseils de l’entourage n’est valable, seul l'admirable architecte parle de soins médicaux. Ce film ne me plait pas, d’où mes 3 étoiles, car Bunuel y est trop contraint et que les maladies mentales me font peur, je ne le crois utile que pour les élèves psychiatres. Un détail : quand vous aurez vu ce film vous ne regarderez jamais à travers le trou d’une serrure, j’en ai encore froid dans le dos.
Le meilleur film de Bunuel ? Peut-être pas, mais dans les trois ou quatres premiers, après "Los Olvidados", "La vie criminelle d'Archibald de la Cruz", voir "Tristana". La période mexicaine de Luis Bunuel est la plus intéressante, la plus accessible aussi, parce qu'elle s'installe dans la réalité pour mieux en détourner les codes par la grande intelligence de la mise en scène et la maîtrise de l'écriture. Pour avoir vu et revu ce film plus d'une vingtaine de fois, voir plus en comptant les multi visionnages des séquences : c'était un des films prévu et sur lequel je suis tombé à l'épreuve orale du Bac Cinéma. Film qui a toujours pour moi une grande résonance émotionnelle, dû au fait que je vivais au quotidien les affres destructrices de la jalousie pathologique de mon père et le drame vécu par ma mère... A moins que je ne manque d'objectivité, ce film est le film a voir pour comprendre le mécanisme de la jalousie obsessionnelle. Le meilleur sur le sujet. Bunuel en décrypte minutieusement, tel un psychanalyste qui serait cinéaste, les processus. Le surréalisme, ici plus subtil qu'à l'accoutumée, mais présent dans chacune des séquences, est utilisé pour expliquer au plus près ce qui se passe dans la tête de Francisco, mais aussi dénoncer l'hypocrisie de l'église et de la bourgeoisie. Un de seuls films où Bunuel maîtrise l'art de la montée progressive de l'angoisse, de la peur et de l’effroi comme lorsque l'on vie à côté d'un jaloux pathologique. On peut aussi se demander dans quelle mesure Hitchcock n'a pas été influencé par ce film dans la construction scénaristique de certaines de ses œuvres ultérieures, dont et surtout "Vertigo". Ajoutons à l'ensemble, une direction artistique flamboyante et des acteurs superbement dirigés. Un très grand film.
Film génial, qu'il faudrait détailler plan par plan- l'ouverture, la fermeture, les pieds sur lesquels nous marchons et qui nous portent... à moins que... attendez... Bref, le film est impossible à résumer (tant mieux pour ceux qui ne l'ont jamais vu), étude de la paranoïa, film de série (il en traîne combien d'aussi fabuleux dans les cartons de l'indifférence généralisée?) avec cet implant d'acidité qui n'appartenait qu'à Bunuel. Dans mon top 30 des films à voir, aucun doute là-dessus. Esta complatemente loco!
Avec Tourments je m'offre mon tout premier Bunuel et je commence fort, j'ai vraiment été ébloui par ce film une sorte de thriller marital qui par moment m'a fait songer au Vertigo de Hitchcock (notamment la scène de l'église qui a sûrement du inspirer Sir Aflred) et si ce n'est pas un thriller à proprement parler ce film possède une certaine dose de suspense. Le drame de la jalousie filmé dans toute sa splendeur ce qui s'annonçait une belle vie pour une belle femme va rapidement se transformer en enfer. Mais aucune violence physique ici seulement des remarques et des suspicions qui vont miner le couple ; une réalisation toute en finesse de Bunuel. Je ne m'attendais pas du tout à une telle fin. J'avais regardé Tourments pour découvrir son cinéma mais je ne m'attendais pas à un film qui me plaise autant.
El ! est à mes yeux le chef-d'oeuvre de Luis Buñuel. D'une forme pourtant tout à fait classique, le cinaste retrouve ses thèmes chers du désir, de la haute bourgeoisie, de la religion et de la folie, sur un fond de surréalisme propice à traiter cette folie. L'histoire est assez banale : un homme parvient à séduire la femme de ses rêves, après l'avoir tant convoitée, il l'enferme chez lui, la coupe du monde et va jusqu'à la battre. La paranaoïa rend cet homme ignoble alors qu'il était juste. Une série de scènes terribles rendent compte de la descente aux enfers de la femme, emprisonnée malgré elle : le portail de leur splendide demeure évoque une sinistre porte de prison. Le film s'ouvre sur une scène grandiose un Vendredi saint (le lavement des pieds fait plutôt penser au Jeudi saint) : le héros, fétichiste, tombe amoureux des pieds avant de la femme elle-même (cette fixation sur les pieds sera une des récurrences du film), et s'achève sur une scène non moins significative : le héros, apparement guéri par une cure de foi est néanmoins toujours aussi fou, il zigzague dans l'allée du cloître de la même façon qu'il zigzaguait dans l'escalier de son manoir, en prise à une crise de folie effrayante, qui forçait son épouse à verouiller la porte de sa chambre, de peur que le monstre s'en prenne une fois de plus à elle. La mise en scène quant à elle, évoque les plus grands films d'Ophüls en intérieur, et les scènes de rue rappellent un précédent film de Buñuel, Los Olvidados. Mais El ! est bel et bien sa plus grande réussite.
Un coup inattendu pour moi de la part de Buñuel car je m'attendais pas à une telle oeuvre, à un tel chef d'oeuvre malgré l'immense renommée méritée de son cinéaste. Déjà il n'est pas possible qu'Hitchcock n'ait pas vu ce film par une suite de détails qui rappelle l'univers du Maître du suspense (notamment le train pour suggérer vous savez quoi !!!), le goût qu'on en commun les deux réalisateurs pour exposer les perversités (de manière plus explicite qu'en même chez Buñuel !!!), la présence d'une femme très belle et élégante comme victime, qui blondeur exceptée a tout pour faire une très bonne héroïne hitchcockienne, et enfin THE scène qui a fortement et incontestablement inspiré le cinéaste anglais : celle du clocher qui fait tout de suite penser à celle finale de "Sueurs froides". Mais Buñuel est Buñuel, et contrairement à Hitchcock qui sacrifiait un peu de crédibilité au profit de la mise en scène, ici c'est le réalisme clinique qui règne se permettant juste une séquence spectaculaire où le mari jaloux croit voir dans sa folie les paroissiens dans une église se moquer de lui ce qui la rend que plus percutante. Cette plongée dans un amour fou qui vire très vite à la jalousie maladive bien aidée par une interprétation impressionnante est franchement angoissante et ce n'est pas le final peu rassurant qui va arranger l'affaire. Ah oui, une dernière chose si Buñuel met de côté son surréalisme il n'en oublie pas autant de flinguer comme à son habitude la bourgeoisie (par l'intermédiaire du personnage de la mère !!!) et l'Eglise (par l'intermédiaire de celui du prêtre !!!). Cauchemardesque, un Buñuel au sommet du sommet de son art et pour moi le plus grand film de son immense metteur en scène.
Un film qui fait beaucoup penser à “La Vie criminelle d'Archibald de La Cruz”. La réalisation de Bunuel est reconnaissable entre toutes. La maturation, chez la femme, de l'idée selon laquel son mari est fou de jalousie, au sens propre, est extrêmement bien menée. On apprécie également la non-continuité narrative qui donne beaucoup de relief à cette maturation.
La représentation réaliste de la folie est une aporie. Bunuel le tient presque jusqu’au bout : dans les toutes dernières scènes arrive tout de même l’hallucination. La jalousie paranoïaque doit être la pathologie masculine même. Bunuel en fait l’exposé rigoureux. Volonté morbide de maîtrise, dérèglement du sens du hasard, mégalomanie… C’est un film des années 50, mexicain, pas très loin des films noirs américains de la même époque. Mais chez Bunuel pas de gratuité, peu de contraintes commerciales, sens analytique rigoureux, absence de facilités spectaculaires. Classique indispensable pour cinéphiles et curieux de psychologie des profondeurs.
A lire les critiques - élogieuses pour la plupart - concernant El de Luis Bunuel, on pourrait s'attendre à quelque chose de transcendant... Pourtant, il s'agit pour ma part d'un petit film sans caractère : pas désagréable à regarder certes, mais définitivement commun. On a la méchante impression d'avoir vu ce film des dizaines de fois ( la prévisibilité du montage est indiscutable : les fondus enchaînés pour annoncer les changements de séquence, ça commence à bien faire ! ), et l'on peine à discerner la moindre inspiration stylistique. Cela dit, El part d'un sujet intéressant : celui de la possession conjugale inhérente à la gente masculine. Hélas, Luis Bunuel ne parvient pas à mettre en valeur la jalousie maladive de son personnage principal, et par conséquent rien ne décolle ( nous sommes loin de l'incroyable Jake la Motta de Scorsese, qui reste selon moi indétrônable en la matière...). Au final, El est un petit film divertissant, quelconque et fort peu inspiré. Luis Bunuel a connu des jours meilleurs...
Bon film soigné sur la jalousie et sur le paraitre, avec des acteurs excellents. Je suis un peu déçu je m'attendais sur la fin à une petite pic caustique donc Bunuel à le secret mais il n'avait peut être pas toute la liberté voulue.
Une oeuvre relativement importante dans la carrière de Bunuel, qui continue ici à traiter avec un certain brio les pulsion shumains les plus violentes et malsaines. Mais cela est toujours avec une grande tenue, et au service d'un scénario bien écrit et bien construit, et porté par des acteurs fort convaincants. L'ensemble se révèle au final assez fascinant. A découvrir.
«El» (Mexique, 1952) fait parti de ces bons films mexicains dont Luis Bunuel avait le secret. Traitement typiquement bunuelien de la folie et de la jalousie, ce «El» perturbe de par la vraisemblance des situations et de létrange catharsis auquel on nous contraint. Tout comme Bunuel le fera pour «El rio y la muerte» (Mexique, 1954), la majorité de lhistoire est un flash back, nous narrant les tenants du drame. Tenants qui tirent leurs natures dune irrationalité conjuguée avec une logique de jalousie, autant dire un désastre que Bunuel agence parallèlement à la tension. Ce qui fait d«El» un film dramatique, cest la progressivité inéluctable de la folie envahissant Francesco. Cette folie jalouse est accentuée par les interprétations perverses de Francesco à propos de tous les agissements de sa femme, martyr de lhistoire, objet de lobsession possessionnelle. Un simple mot quelle échange avec un homme devient un affront pour son mari, une trahison même. Si Luis Bunuel met particulièrement laccent sur Francesco, ceci car le cinéaste a avoué y avoir mis du sien, cest davantage pour le personnage de sa femme quon prend pitié. Victime de limprobabilité des humeurs de son mari, de son lunatisme, on craint à tous instants les accès de folie de l'homme dampleur de plus en plus importants. Et cest cette crainte perpétuelle, comme dans un film de David Lynch, qui donne au film sa vigueur et son engouement. Enfin, il y est aussi question dhonneur, fruit dune étrange maïeutique, celle de la jalousie masculine. Cruelle révélation officieuse qui dans le cynisme bunuelien nous apparaît comme en son essence : dun pathétisme affligeant. En conclusion, «El» est un chef duvre mexicain de Luis Bunuel, un film sur le couple, sur lutilisation de lun par lautre, sur lessence hypocrite de lamour lorsque celui-ci est entaillé par la jalousie. A voir assurément en couple.