Fascinant. Si je ne devais choisir qu'un adjectif pour qualifier cet authentique chef-d'oeuvre, ce serait celui-là. Pur objet de fascination, en effet, que ce "Vertigo" qui s'apparente tout d'abord à un très grand film d'atmosphère. La synergie entre toutes ses composantes esthétiques (photographie aux couleurs flamboyantes et irréelles, cadrages et travellings à se damner, découpage à la précision affolante, partition de Bernard Herrmann obsédante par son caractère tour à tour menaçant et romantique) crée un climat unique, entre lyrisme et onirisme, une sensation de rêve éveillé qui permet au spectateur, au fil des minutes et des rebondissements, de pénétrer un peu plus le film, jusqu'à l'habiter complètement. "Vertigo", c'est aussi une histoire d'amour (
rendue impossible par l'appât du gain, le souvenir de Madeleine ou tout simplement la fatalité - voir le terrible "deus ex machina" final
) entre deux acteurs au sommet de leur art: James Stewart, habité par son rôle, époustouflant dans ses nuances de jeu, et Kim Novak, pur bloc de présence, irradiante de mystère et de sensualité mêlés, aussi sublime que sublimement filmée. Impossible cependant d'épuiser en une critique la richesse d'un tel film, à la fois inquiétant, envoûtant et bouleversant (notamment à travers le personnage, secondaire mais magnifique, incarné par Barbara Bel Geddes). D'une intensité inégalable, émaillé de scènes absolument monstrueuses (le cauchemar de Scottie, le célèbre baiser suivant la "transformation" de Judy), le film, comme toutes les œuvres majeures, nous laisse sidéré, hagard, exténué devant tant de beauté. Grandiose !