Inédit en salles en France, Dead Man's Shoes est l'exemple même du petit film indépendant, du polar fauché: très peu d'acteurs (les rues semblent désertes...), un scénario qui semble simpliste (le mec qui revient dans sa ville pour venger son frangin), filmé façon fait divers, dans des paysages désertés d'un trou paumé d'Angleterre, mais le film s'avère être beaucoup plus profond qu'il n'y paraît.
En effet, à la place du "revenge movie" attendu, on trouve une plongée dans un monde désespéré, une Angleterre limite glauque, où s'agitent une poignée de loosers minables.
Ici, rien de drôle, aucune dérision: violence sèche, réaliste, on entre dans un monde où un coup de hache fait réellement mal, aucune issue possible, happy end zero.
Même le personnage principal, Richard, à quelque chose de monstrueux. Attachant, certe, mais monstrueux: il possède sa propre morale, sa propre idée de de la justice, et ce n'est pas pour le plaisir du spectateur. Plus Richard avance dans sa quête, plus il s'enfonce dans la bestialité. Même les "méchants" ici restent attachants: ils sont loin des crapules irrécupérables des films d'action américains, ce sont juste de pauvres types, gouvernés par l'alcool et la came, bêtes mais pas vraiment méchants, qui malgré leurs actes restent humains, et les voir disparaître reste assez déprimant.
Paddy Considine (vu dans "24 hour party people" de M.Winterbottom), incarne magnifiquement le personnage de Richard, s'investissant à fond dans le rôle, de même pour le reste du casting, qui parviennent à donner tout son réalisme au film: les dialogues semblent improvisés, les personnages sont banals et les environnements désolés, au milieu de nulle-part, et le final en est d'autant plus douloureux. C'est ce réalisme qui donne sa force au film: ce film n'est certainement pas un divertissement, c'est un vrai film d'auteur, qui, si déplaisant soit il, mérite d'être vu.