Dès la première scène, Brian de Palma annonce la couleur : son film traitera de violence, de rédemption et de destinée. En faisant le choix d’annoncer immédiatement la mort de son héros et d’utiliser une voix off, le réalisateur veut visiblement se démarquer de son "Scarface", tourné 10 ans avant avec le même Al Pacino. Et cette filiation, sans doute non-désirée, est clairement l’un des principaux problèmes du film. En effet, difficile voire impossible, en voyant ce Carlito Brigante, de ne pas penser à Tony Montana et à ce qu’il serait devenu s’il avait survécu et décidé de se ranger dès voitures après un séjour salvateur en prison. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la prestation de Pacino, aussi réussie soit-elle, ne parvient pas à égaler l’outrance fabuleuse de Montana. Résultat : l’acteur ne tire pas forcément son épingle du jeu, au point que ce rôle est rarement cité dans la liste de ses meilleures interprétations. Pire, il se fait allègrement piquer la vedette par Sean Penn qui, pour sa part, campe un avocat véreux et camé jusqu’à la moelle, dont les angoisses et le look sont, tout simplement, extraordinaires. Ce personnage est d’autant plus fantastique qu’il met en exergue tout le côté pathétique de ces avocats qui veulent vivre la vie de leurs clients criminels pour finalement se brûler les ailes… ce qui apporte une véritable plus-value au film qui, pour le reste, s’avère assez convenu. En effet, côté mise en scène, on a connu un De Palma plus imaginatif (voir "Les Incorruptibles" ou "Mission : Impossible") même s’il s’acquitte honorablement de sa tâche. Quant au scénario, le coup du mafieux qui veut couper les ponts avec son milieu pour vivre une vie honnête avec une gentille femme, mais qui va être rattrapé par son destin a déjà été pas mal porté à l’écran. Il n’y a, d’ailleurs, pas beaucoup de surprises dans cette intrigue, mais plutôt quelques facilités scénaristiques (Brigante qui veut tirer un trait sur son ancienne vie mais qui va tenir une boite de nuit connu pour être un repère de mafieux ou qui va accepter d’aider son ami avocat, même s'il sait que c’est un parasite qui va forcément s’attirer des ennuis…). J’ai, en outre, été assez peu emballé par la love-story du héros avec son amour passé Gail (campée par une Penelope Ann Miller, franchement potiche). Le film est, pour autant, loin d'être mauvais et ne manquera pas de divertir le spectateur avec son portrait de New-York côté voyou et ses séquences de tension assez réussies (le guet-apens du début, la poursuite finale de la boîte au quai de la gare...). Et puis, le reste du casting vient rehausser le niveau, à commencer par un John Leguizamo détestable en jeune caïd frimeur et un Viggo Mortensen étonnant en taupe malgré lui. "L’Impasse" reste, donc, un film intéressant sur l’impossible rédemption des criminels mais aurait gagné à soigner davantage son intrigue et sa mise en scène. A moins que ce soit tout simplement la présence d’Al Pacino en mafieux qui ait placé la barre des espérances trop haut…