Original ça, une fable sociale assez pessimiste qui a pour particularité d'être tournée comme un film muet d'époque : format court (moins d'1h10), mignon n/b de rigueur, dialogues remplacés par des cartons, symphonies très expressives... Et c'est pas mal, ça fonctionne bien, le film n'interroge rien du tout mais diffuse savamment ses petites émotions. Le problème de Kaurismaki, c'est que son actrice fetiche, Kati Outinen, n'est vraiment pas jolie... C'est con.
À l’occasion de la sortie des "Feuilles mortes", la Filmothèque du Quartier latin a la bonne idée de proposer une rétrospective des vieux films de Kaurismäki. C’est l’occasion de voir ou de revoir ces pépites, de vérifier aussi si le reproche fait aux "Feuilles mortes" – reproduire une formule trop bien rodée – est ou pas pertinente.
"Juha" a été tourné en Finlande en 1999. Matti Pellonpää est mort en 1995. Mais Kati Outinen est toujours fidèle au poste. "Juha" est peut-être le film le plus radical de Kaurismäki. C’est un film en noir et blanc – ce qui constitue déjà une sacrée transgression en cette fin de vingtième siècle – mais c’est au surplus un film muet, construit comme l’étaient les films des premiers temps du cinéma, avec des cartons qui s’intercalent entre les plans pour quelques lignes de dialogue que l’expressivité outrée des personnages n’a pas permis de comprendre. "The Artist" reprendra cette idée, avec le succès qu’on sait quelques années plus tard. L’intrigue est celle d’un roman classique finnois ultra-référencé : l’histoire d’un époux bienveillant, de son épouse innocente et d’un étranger sournois qui la séduit et l’enlève pour la livrer à la prostitution.
Une histoire toute simple filmée en noir et blanc comme au temps du muet. Cela oblige le spectateur a être attentif à des détails de mimiques des trois personnages. Le fermier, trop naïf au départ pour se rendre compte de ce que complote ce commerçant dont la voiture est tombée en panne sur ses terres et sa femme, troublée par cet homme de la ville qui lui fait miroiter une autre vie. Rien de bien original dans le thème sauf que le réalisateur finlandais Aki Kaurismächi arrive à créer une atmosphère fascinante et à garder son fil conducteur jusqu'à la conclusion.
Réussite de Kaurismaki, filmé en noir et blanc, muet et désespéré " juha" fait pourtant partie des opus généralement peu cités parmi les titres phares du cinéaste.
Certes le scénario est peu développé, mais "juha" ( le titre correspond au nom du personnage innocent sur lequel tombe le malheur et la trahison) est vecteur d'une forte émotion.
On retrouve ici, le noeud thématique développé dans la plupart des titres du cinéaste finlandais : face à la dureté du monde et de la vie, seul l'amour est un espace de lumière. Mais sa rencontre n'est pas offerte à tous et peut même comporter son espace de tristesse et de malheur.
A mes yeux, c'est un des films les plus tristes et dépressif de son auteur ( d'ou peut-être sa relative confidentialité) mais l'amateur du travail de Kaurismaki ne le laissera pas passer.
Aki Kaurismaki maîtrise à la perfection l'art de désarçonner le spectateur grâce à des films étonnants et ambitieux. Juha en est l'exemple parfait, film muet en noir et blanc (Hazanavicius n'a rien inventé) sur une bande son originale qui rythme parfaitement le film. Kaurismaki contrôle parfaitement son sujet et fait de son film une oeuvre unique. On ne peut que saluer la performance, et si on aime le cinéma scandinave, on sera ravi.
Chaque film de Kaurismäki semble être une fin, comme si créer était pour lui une manière de vivre l'arrachement d'une partie de lui-même. Combiné à une espèce de je-m'en-foutisme, cela fait de lui le talentueux poète noir et grinçant qu'il laisse ici parler à cœur ouvert. La preuve : il a fait un film muet parce qu'il n'avait pas réalisé que son acteur André Wilms ne parlait pas finnois ; pourtant, c'est tellement maîtrisé que ça aurait pu être prévu.
Difficile de produire un film noir et muet comme "à l'époque", où la musique, loin d'accompagner ou de souligner l'action comme aujourd'hui, en était le reflet exacerbé. Kaurismäki y parvient sans y ajouter sa propre technique, ce qui était peut-être une mesure d'économie ou de minimalisme de sa part, toutefois c'est ce qui rend l'ambiance de Juha unique. Muet, il nous réduit au silence.
On peut lui reprocher de ne rien avoir approfondi. Sans fond ni procédés, il est l'archétype de l'histoire pour l'histoire, nécessitant qu'on sache s'y attacher sans avoir trop d'exigences. Encore une fois, même dans la nouveauté et en réussisant presque malgré lui, le cinéaste fait de sa création une fin en soi : a-t-il encore des choses à dire ? Mais j'y réponds : en a-t-il jamais eu ?
Juha, alliage entre classicisme et modernité, est un film singulier dans la filmographie d’Aki Kaurismäki. Filmé en noir et blanc, Juha est un long métrage parlant auquel le réalisateur a coupé la bande son pour la peupler de multiples musiques et chansons parfaitement synchronisées sur le montage du film. Dans les faits, seules trois scènes sont accompagnées de leur bande son originale : une séquence musicale, une autre chantée en français alors que la troisième, uniquement bruitée, annonce le switch final. Critique complète sur incineveritasblog.wordpress.com
Absolument fantastique. J'avais peur que ce film m'ennuie à cause du choix de Kaurismaki de faire un long-métrage muet ... mais non ! Bon, je dois dire que j'étais déjà fan de ses films minimalistes, aux dialogues trèèès épurés ... Mais je vous conseille vraiment de voir ce film, et d'entrer dans l'univers de ce génie.
André wilms était un comédien inoubliable cet excellent film muet montre que la vie n'est pas un long fleuve tranquille dès qu'un inconnu s'imisse dans la vie des autres pour en tirer profit au détriment du bonheur des autres
Kaurismäki est décidément un cinéaste à part. Et génial. En concevant le dernier film muet du XXe siècle, il rend un hommage appuyé aux maîtres du début du siècle dernier (Sjöstrom, Murnau,...) tout en restant fidèle à son univers singulier et à ses thématiques : la vie des désaxés, de ceux à qui la chance ne sourit pas vraiment, mais qui se retrouvent éclairés par la lumière du cinéaste qui pose sur eux un regard bienveillant et rempli d'humanité. Une expérience unique à vivre, si vous le pouvez, avec la présence du Anssi Tikanmäki Orchestra interprétant en live la bande son du film. Magique.