Une suite Disney des plus médiocres qui soient. L'histoire est basique :
à bord du navire qui l'amène vers l'Angleterre, Pocahontas ne se doute pas des aventures qui l'attendent. Escortée par le gentleman John Rolfe, son immense garde du corps Uté, et trois passagers clandestins Meeko, Flit et Percy, elle commence une importante mission de paix. Un monde nouveau l'attend : les rues animées et commerçantes de Londres éblouissent la belle indienne... Mais le beau spectacle est vite gâché par la découverte du complot de Ratcliffe. Pocahontas est alors prise au piège
... Certaines choses prêtent à sourire, d'autres à faire grincer des dents. S'il est relativement courant qu'une suite d'un film soit moins bonne que l'original, il est par contre extrêmement rare qu'une suite détruise en un claquement de doigts tout le message de son aîné. "Pocahontas 2 : Un monde nouveau" réussit à démontrer que les DisneyToon Studios sont capables de tout ! "Pocahontas, une légende indienne" avait été un grand film d'animation au message écologique et de tolérance pertinent, enrobé d'une somptueuse histoire d'amour qui n'avait jamais connu plus belle conclusion dans aucun autre film des Walt Disney Animations Studios. Bien évidemment, ce parti pris de faire naître une histoire d'amour touchante entre Pocahontas et John Smith n'était que pure utopie de la part des studios Disney. Or, au vu de la fin résolument ouverte de "Pocahontas, une légende indienne", et surtout plus soucieux de se rapprocher de la réalité historique, cette suite Disney détruit minute après minute tout l'intérêt de son aîné. En soi, c'est un véritable exploit qu'aucune autre suite n'a jamais égalé depuis ! Le début du film commence moyennement bien, même si l'on constate irrémédiablement le manque de moyens déployés dans cette séquelle exclusivement conçue pour le marché de la vidéo, rendant le film visuellement affreux. Nous y retrouvons
Pocahontas devenue le lien naturel entre son peuple et les colons. Certes, elle est encore hantée par son passé et sa plaie amoureuse n'est pas totalement refermée. Et lorsque l'amérindienne doit jouer le rôle de porte-parole de son peuple auprès de la cour de Jacques Ier, on s'attend à voir se multiplier les quiproquos protocolaires
. Malheureusement, rien de tout cela dans ce film qui se contente tranquillement de réutiliser les ficelles du premier film :
l'arrivée à Londres de Pocahontas fait ainsi écho à l'arrivée des colons, tout comme la sombre chanson de Ratcliffe rappelle furieusement celle où il traitait déjà son peuple de sauvage
. Heureusement, deux chansons sont particulièrement intéressantes. "Quand il vous verra" est ainsi un contrepoint éloquent à "L'air du vent", démontrant comment un même point de vue peut être différemment apprécié par deux peuples, tandis que la chanson titre "Au seuil de mon avenir" devient le fil conducteur de l'intrigue du film. Tout tourne en effet autour de ce questionnement. La seconde partie du film se veut plus légère et très ciblée jeune public. Elle multiplie les gags passe-partout mettant en scène
de nombreux rôles secondaires, dont Percy, Meeko et Flit bien sûr, mais aussi Uté et Miss Jenkins, deux nouveaux personnages particulièrement anecdotiques et qui ne servent vraiment pas l'intrigue
. C'est aussi dans cette seconde partie que cette suite commet ses premières profanations vis-à-vis de son prédécesseur. Les scénaristes insufflent
une nouvelle intrigue amoureuse entre Pocahontas et le noble John Rolfe
. Ce sacrilège aux yeux des fans du premier film n'en est pourtant pas un. Dans la réalité historique,
John Rolfe et Pocahontas se sont en effet bel et bien mariés, tandis que Pocahontas se convertissait au christianisme tout en changeant de nom au profit de Rebecca Rolfe. Le problème majeur de cette nouvelle intrigue amoureuse réside surtout dans la trahison pure et simple des propos de "Pocahontas, une légende indienne", dont la relation avec John Smith était la clé du succès, alors que justement celle-ci n'avait jamais existé dans la réalité. C'est d'ailleurs lorsque John Smith resurgit sans prévenir d'entre les morts
que la troisième partie du film devient à la fois plus palpitante et plus dérangeante. Car c'est à ce moment précis du film que le spectateur prend immédiatement conscience que cette suite va anéantir tous ses espoirs. Exploitant la recette éculée du trio amoureux, le spectateur est assez vite déchiré par ce qu'il découvre au fil des minutes qui passent. De plus, les enjeux politiques
entre le peuple de Pocahontas et les Anglais sont immédiatement écartés pour se recentrer exclusivement sur le désir de vengeance de Ratcliffe
. La fin du film laisse ainsi un arrière-goût doux-amer, à mille lieux du magnifique final du premier film, se perdant en conjectures et dans le message hérétique de dire que seules les apparences comptent. Il est loin le temps de la compassion véhiculé par "L'air du vent" qui ne souffle pas du tout à Londres. Je reste aujourd'hui encore extrêmement partagé par cette suite Disney. D'un côté, ayant apprécié l'intrigue et le superbe final de "Pocahontas, une légende indienne", je ne peux pas pardonner la trahison de Pocahontas envers John Smith. Sans compter que techniquement, le film est très limité artistiquement parlant. De l'autre, ce film est audacieux car il reste unique en son genre au sein du catalogue de Disney. Aucun autre film d'animation n'est allé aussi loin en décidant de
séparer volontairement l'un des couples les plus mythiques du cinéma d'animation afin de se conformer à la réalité historique
. Un vrai coup risqué de la part des DisneyToon Studios, qui a désormais réussi à scinder les fans du premier film en deux clans bien distincts : ceux qui plébiscitent le culot incroyable de cette suite, et ceux qui trouvent cette suite inexcusable. J'appartiens personnellement à la seconde catégorie