J’aime beaucoup Kusturica, et Arizona Dream fait partie de mes films préférés, mais Chat noir, chat blanc est quand même moins enthousiasmant.
Ok il y a les bons côtés du cinéma du réalisateur. De la fantaisie, de l’humanité, quelques moments bien rigolos, une ambiance singulière, le tout porté par une mise en scène flamboyante qui reste un des meilleurs côtés du film. Ici l’ambiance singulière est créé bien sûr à partir des décors, parfois surprenants, qui donnent un côté réel et pourtant onirique au film, et à la photographie à la belle lumière naturelle, qui manque peut-être un peu cependant de subjectivité. Elle est là, mais on ne la sent pas assez travaillée.
En fait on retrouve le capital sympathie des films du réalisateur, avec ce côté gouailleur, comico-tragique, qui donne toute sa singularité au cinéma du metteur en scène.
Mais en dépit de ses qualités, Chat noir, chat blanc est loin d’être parfait. D’abord par une bande son beaucoup trop envahissante. Certes appréciable, elle est quasi-omniprésente, finissant par agacer, surtout lorsqu’elle couvre les dialogues ! Trop répétitive, débordante, Kusturica est ici tombé dans le piège. Une belle bande son c’est un atout, mais il faut vraiment la maitriser sinon ça peut devenir très gênant.
De la même manière le film se veut ébouriffant, et s’il l’est, c’est contre la fluidité de la narration et surtout un minimum de rigueur. Ultra-bavard, apportant un truc nouveau toute les 5 secondes, le film est épuisant et brouillon à suivre. C’est un véritable inventaire à la Prévert, et pourtant l’histoire en soi n’est pas si compliquée ni si recherchée que cela, mais alors Kusturica bourre son film de tout et n’importe quoi, et ça devient assez vite, sur plus de 2 heures, pas très digeste non plus.
Côté acteur c’est un peu pareil. De bons acteurs, bien dans leurs rôles avec parfois des têtes marquantes, mais une foule de personnages, dont certains passent et se font oublier, puis reviennent, dans une forme de mic-mac vite inextricable. Une dimension pléthorique de laquelle on s’extirpe difficilement. C’est dommage, et c’est là où une histoire mieux tenue aurait été très appréciable.
Clairement Chat noir, chat blanc peut se résumer ainsi : brouillon à force de générosité. On sent que ce n’est pas un mauvais film, qu’il y a de bonnes choses, que c’est frais, mais alors Kusturica en fait quand même beaucoup trop. 3.