Après avoir vu des chefs-d’œuvre du genre tels que Le Parrain, Les Incorruptibles, Les Affranchis ou encore Casino, il me restait un dernier grand film de gangsters que je n’avais encore jamais découvert pour perfectionner encore plus ma cinéphilie. Un film devenu totalement culte pour énormément de monde et aussi considéré comme une des meilleures œuvres de son réalisateur Brian De Palma. Le titre vous le connaissez forcément, il s’agit bien sûr de Scarface. Mais étrangement, et je m’y attendais un peu quand même, ce soi-disant chef-d’œuvre du cinéma ne m’a pas passionné comme je l’aurai voulu et il ne m’a pas véritablement convaincu comme étant un des meilleurs films dans le genre. En 1980, Tony Montana bénéficie d’une amnistie du gouvernement cubain pour retourner aux Etats-Unis et plus particulièrement en Floride où il décide de s’installer. Très ambitieux et surtout sans scrupules, il élabore un plan pour éliminer un caïd de la pègre et prendre la place qu’il occupait sur le marché de la drogue. Sorti en 1983, Scarface est tout d’abord, et avant d’être un film de gangsters culte, un remake de l’œuvre éponyme d’Howard Hawks sortie en 1933 avec Paul Muni dans le rôle principal. Bien évidemment, il faut noter qu’il s’agit d’un remake actualisé pour les années 1980 où l’action qui se déroulait à Chicago dans le film original se déplace ici à Miami avec non-pas un immigré italien comme héros mais un cubain et dont les trafics sont très différents puisque nous passons du trafic d’alcool pendant la Prohibition au trafic de cocaïne dans le contexte des 80’s. Et donc, lorsque Scarface est sorti en 1983, il reçut un accueil assez mitigé de la part de la presse à cause de sa forte vulgarité et de sa violence parfois extrême pour l’époque. Mais il sera heureusement un succès au box-office américain malgré cet accueil froid de la presse et rapporte en fin d’exploitation près de 45 millions de dollars de recettes, permettant ainsi de rembourser ses 25 millions de budget. Et comme vous le savez, Scarface de Brian De Palma atteindra ensuite le statut d’œuvre culte du cinéma après avoir été réévalué au fil du temps par la critique professionnelle et par les nombreux spectateurs sceptiques au moment de sa sortie en 1983. Littéralement une page de l’Histoire du film de mafia quand on y pense. Mais que vaut réellement le film aujourd’hui ? Mérite-t-il son titre de « chef-d’œuvre » ou de « classique du genre » ? Est-il du même niveau que Le Parrain de Francis Ford Coppola ou des Affranchis de Martin Scorsese ? Eh bien à titre personnel je dois dire que c’est non, un petit non en fait. Il faut savoir que le film de Brian De Palma m’attirait énormément et depuis longtemps, normal, après avoir découvert la trilogie du Parrain, Les Affranchis de Scorsese, Casino du même réalisateur qui m’a totalement bluffé ou encore Les Incorruptibles de Brian De Palma qui est revenu au genre en 1987 pour cette fois-ci un vrai chef-d’œuvre, je me devais donc de découvrir ce fameux Scarface ! Mais il se trouve qu’avant de le voir, plusieurs personnes l’ayant vu m’avaient confié avoir été assez déçu par ce film, le trouvant très long et pas aussi « énorme » qu’elles le pensaient. Et c’est vrai, Scarface n’est pas aussi captivant et efficace qu’un des films de l’immense trilogie du Parrain de Coppola ou qu’un film de gangsters moins célèbre mais d’excellente facture tel que le récent Strictly Criminal de Scott Cooper. Le film de Brian De Palma est en effet très long, il s’étale sur près de 2h50, ce qui fait de lui un véritable opéra cinématographique qui prend bien son temps pour raconter son histoire. Et il est là le problème, le film est trop lent pour ce qu’il ambitionne de nous raconter, à savoir l’ascension fulgurante et la chute brutale d’un petit gangster dans le Miami des 80’s. Il y a donc très peu d’action ou de moments de rythme et de tension qui vont nous prendre aux tripes et de plus le film semble avoir mal vieillit à cause de cette absence de rythme dans la mise en scène et dans le scénario, pourtant écrit par Oliver Stone ! A cause de cela je n’ai pas pu apprécier Scarface comme je l’aurai voulu, j’ai aimé le film bien sûr mais je ne l’ai pas vu comme étant un chef-d’œuvre. Peut-être qu’un second visionnage sera nécessaire étant donné que je sais à quoi m’attendre, l’avenir nous le dira. Mais hormis cet élément assez contraignant tout de même, je dois dire que le film se regarde bien notamment grâce à la performance folle d’Al Pacino qui nous offre un des meilleurs rôles de sa carrière (j’ai quand même une préférence pour son interprétation de Michael Corleone, plus subtile, plus puissante, plus sombre et torturée). Ambitieux, intelligent, très violent, très vulgaire aussi, accroc à la coke, totalement déchaîné dans la dernière partie du film, le Tony Montana d’Al Pacino est instantanément un personnage culte du Septième Art, beaucoup plus « beauf » que Michael Corleone (les époques et les personnalités sont différentes aussi mais c’est un peu mon impression). Mais l’acteur est ici brillant, il n’est jamais dans le cabotinage et marqua clairement les esprits des cinéphiles. N’oublions pas aussi qu’Al Pacino est entouré des sublimes et sensuelles Michelle Pfeiffer et Mary Elizabeth Mastrantonio ainsi que des très bon Steven Bauer et F. Murray Abraham qui complètent ce casting cinq étoiles rassemblé par Brian De Palma. Et enfin, même si le film manque cruellement de rythme par moment, il faut bien avouer que les rares scènes de suspense et d’action sont marquantes ! D’abord la fameuse séquence avec la tronçonneuse dans la salle de bain d’un appartement où un échange d’argent et de drogue se transforme en interrogatoire et découpage ultra-violent et sadique durant la première partie du film. Et ensuite, Brian De Palma nous offre dans la dernière partie de son long-métrage une séquence d’action d’anthologie qui commence avec le « pétage de câble » de Tony Montana qui brise à jamais la vie de sa sœur (elle aussi en profite pour péter les plombs d’ailleurs une fois chez Tony), et tout ça se termine dans une énorme fusillade dans la villa du gangster où il fait face, seul et armé d’un fusil d’assaut muni d’un lance-grenade, à une armée d’hommes de main envoyé par un de ses associés très en colère contre lui après l’échec d’une importante mission à New York. Des explosions, des balles, du sang, des morts, des cris,… bref la conclusion de Scarface est brutale et mémorable, le meilleur moment du film où tout le jeu d’Al Pacino explose dans un déchainement de violence et d’hystérie ! Là, Brian De Palma nous offre enfin un rythme effréné, un rythme que l’on aurait aimé ressentir plus souvent dans son film. Mais à part ce petit moment de folie, rien d’autre à se mettre sous la dent dans le reste du film à part peut-être la prise de pouvoir par Tony sur Frank Lopez, les plans de caméra iconiques sur Tony Montana dans sa villa où il profite de son immense bain mousseux, de ses montagnes de coke sur son bureau, etc… Et pour finir, difficile de ne pas évoquer la superbe bande-originale qui donne du rythme et de l’ambiance au film de Brian De Palma. Composée par Giorgio Moroder, elle offre au film une atmosphère très 80’s avec par exemple le fameux « Push it to the Limit » interprété par Paul Engemann. Voilà, Scarface n’est pas pour moi un film qui a la posture d’un chef-d’œuvre du cinéma pour des raisons de coups de vieux, de lenteur et de manque de rythme, mais il reste tout de même un bon film du genre avec un impressionnant Al Pacino, une fin d’anthologie, une magnifique musique, quelques scènes prenantes et forcément des répliques cultes telles que « Moi je suis Tony Montana, vous baisez avec moi le champion ! », « J'ai des mains faites pour l'or...et elles sont dans la merde… » et la plus célèbre d’entre toutes (en VO en plus) « Say hello to my little friend ! ». Alors film culte peut-être, mais pas aussi impressionnant que Le Parrain et sa suite, que Casino ou même que le prochain film de mafieux que Brian De Palma réalisera quatre ans plus tard avec Les Incorruptibles. Mais on se souviendra toujours de Scarface, car comme le dit Tony Montana, le monde est à lui.