Difficile de trouver plus cultissimement kitsch dans les années 90 que la série "Alerte à Malibu" ("Baywatch" pour les puristes). Entre le postulat de départ (le quotidien "agité" de sauveteurs sur une plage californienne), son générique tellement 90’s, sa galerie d’actrices plus canons les unes que les autres (à défaut d’être vraiment crédibles), ses courses au ralenti avec gros plans bien suggestifs, ses maillots de bain rouge (assorti à la bouée de sauvetage) ou encore ses scénarios abracadabrantesques, la série étant tellement improbable qu’elle est rapidement devenue indispensable et a marqué durablement la culture populaire. Une telle série ne pouvait, cependant, prétendre aux honneurs d’une adaptation ciné "premier degré"... sauf à friser le ridicule. Ainsi, comme l’inégal "Starsky et Hutch" et l’excellent "21 Jump Street" avant lui, "Baywatch" est une comédie policière, parodique mais pas trop, qui joue à fond la carte de l’autodérision. La recette est, désormais, connue mais fonctionne plutôt bien ici. Le réalisateur Seth Gordon (à qui on doit l’hilarant "Comment tuer son boss ? ") démontre, à nouveau, son talent en matière de rythme comique et n’économise pas ses efforts en matière de gags et de dialogues WTF. Gordon s’amuse avec les codes de la série et la met au goût du jour (ou plutôt du ton habituel des comédies US gentiment trash, façon "Very Bad Trip"). On moque, ainsi, tout ce qui a fait le succès
(CJ qui court au ralenti au grand étonnement de ses collègues, la police qui se plaint des enquêtes menées par les sauveteurs, les caméos de David Hasselhoff et Pamela Anderson…)
, on brocarde les personnages d’origine en les poussant assez loin
(Mitch en chef protecteur mais également vanneur et très soucieux de sa plastique, Brody en jeune prodige arrogant, CJ en bombe sexuelle objet de tous les fantasmes…)
, on place des fulgurances comiques inattendues (le running gag de Mitch qui refuse d’appeler Brody par son nom, les plans sur son aquarium, la réaction "communautariste" de Brody lorsqu’il se sent insulté par le flic…), on ne néglige pas le quota de séquences explosives dans des décors de rêve… Quant au casting, il fait la part belle aux gravures de mode n’hésitant pas à se moquer d’eux-même, à commencer par Dwayne Johnson et Zac Efron (qui ne cessent de confirmer, l’un comme l’autre, leur formidable talent comique) mais, également, l’amusant Jon Bass en "mec normal" en décalage avec le reste de la bande. Côté filles, l’hommage à "Alerte à Malibu" est parfait avec, notamment, les deux bombes atomiques que sont Alexandra Daddario et Kelly Rohrbach (j’ai moins été convaincu par Ilfenesh Hadera dont le rôle est plus effacé). Drôle, rythmé, sexy… c’est à se demander pourquoi le film s’est vautré lors de sa sortie et s’est fait démolir par les critiques. L’explication se trouve, peut-être, dans les trous d’airs de son scénario (qui n’est pas forcément la priorité du réalisateur) et, surtout, dans ses maladresses pourtant évitables. On a, ainsi, droit à de multiples blagues scatos (avec secrétions corporelles en tout genre et autres "parties intimes" coincées), parfois drôle mais dont la répétition donne l’impression que le film veut se vautrer dans un humour beauf (ce qui est très réducteur). Quant à
la scène de travestissement de Zach Efron
, elle est carrément gênante. Est-ce la raison pour laquelle le public s’est focalisé sur la vulgarité (assumée) de "Baywatch" ? Sans doute, En tout cas, pour ma part, j’ai trouvé que Seth Gordon avait réussi son pari. Je suis visiblement l’un des seuls…