Alors qu'elle rencontre Johnnie, un charmant et malin joueur, dans un train, la belle et riche Lina s'éprend peu à peu de lui. Pourtant, elle va commencer à découvrir sa vraie personnalité et douter de ses faits et gestes...
Dès cette première rencontre, magique, dans le train, le ton est donné et dans un premier temps, Hitchcock met en place une ambiance plutôt légère et on s'amuse à voir un Cary Grant charmeur à souhait faire la cour à une douce et vulnérable Joan Fontaine. Peu à peu, il laisse planer une certaine ambiguïté sur le récit et les personnages, surtout Cary Grant et Soupçons bascule dans une atmosphère plus paranoïaque, pesante et mystérieuse, où chacun des actes des protagonistes est propice à la suspicion.
C'est d'abord par sa qualité d'écriture (personnages et dialogues notamment) que Soupçons brille, d'une grande intelligence et extrêmement bien ficelé. Le spectateur se retrouve peu à peu dans la même position que Joan Fontaine, c'est-à-dire à douter des faits et gestes de Cary Grant et Hitchcock justifie son surnom de maître du suspense pour le maintenir de bout en bout. Sa mise en scène est remarquable, sachant bien mettre en avant son atmosphère et il prend bien son temps lorsqu'il le faut, notamment pour développer la relation entre les deux protagonistes, puis l'ambiguïté autour d'eux.
Bien évidemment, c'est aussi grâce à son duo d'acteurs que le film est si réussi, surtout qu'Hitchcock ne manque pas de bien le mettre en valeur. Cary Grant, qu'il dirige pour la première fois (sur 4 au total), ne manque ni de charme ou de malice et retranscrit à merveille toutes les particularités de son personnage, comme Joan Fontaine, qu'il retrouve après le brillant Rebecca, qui incarne à elle seule la fragilité et la douceur. Le maître du suspense inclut une bonne dose de tension lorsqu'il le faut et les scènes mémorables ne manquent pas, telle celle du verre du lait et il fait preuve d'une certaine science du détail, notamment dans ses plans tandis que l'utilisation de la musique est excellente.
Misant sur une écriture intelligente et un magnifique duo d'acteurs, Hitchcock signe une mise en scène inspirée pour d'abord donner un ton léger à son oeuvre puis ensuite entrer dans l'ambiguïté et la parano.