Dixième film de Billy Wilder, « Ace un the Hole » est aussi celui qu’il préférait parmi tous ses films. Il nous fait suivre Charles Tatum, un journaliste sans scrupule qui va tout faire pour exploiter un scoop, celui d’un homme coincé au fond d’une galerie effondrée.
Cela ne surprend pas de voir Billy Wilder s’attaquer à ce drame très noir tant il est capable d’explorer tous les genres, du drame à la comédie en passant par le film noir. Ici c’est l’un de ses films les plus sombres, il y dénonce le cirque médiatique, l’exploitation de la souffrance humaine, les méthodes des journalistes, la corruption, la foule attirée par le moindre scoop mais surtout la nature humaine et sa noirceur.
C’est notamment à travers le personnage principal qu’il le fait, un journaliste que l’on découvre d’abord alcoolique et sans le sou mais toujours sûr de lui, allant chercher un boulot dans un petit journal. Puis quand vient le scoop, on le voit tout faire pour exploiter au mieux le malheur de l’homme coincé dans la galerie, alors que ce dernier voit sa santé se dégrader. Tel un metteur en scène, il dirige tout pour parvenir à ces fins , il manipule et est même prêt à retarder de 5/6 jours l’extraction de l’homme, tout en se faisant passer par son ami. Mais Wilder arrive aussi à l’humaniser à certains moments.
Mais dans cette galerie de personnages sombres, il n’y a pas que lui, Billy Wilder y dépeint aussi la foule qui s’amène en masse, l’arrivé de camions sandwich ou d’une fête foraine ( !) et surtout l’entourage, que ce soit la femme de l’homme à sauver, le chef de sentiers peureux, le sheriff, qui va être aux ordres de Tatum avec comme unique but que l’on parle de lui et qu’il soit réélu ou même de simples apparitions tels que cet assureur proposant dès qu’il peut des cartes de visites.
L’une des forces du film, c’est que les propos que Wilder résonnent toujours forts et justes aujourd’hui et il les traite sans concessions et avec intelligence. Il donne une vraie puissance à son film en ne tombant jamais dans la facilité et en faisant preuve d’un réalisme fort. Les scènes dures et révélatrices ne manquent pas, que ce soit les faces à faces entre Tatum et la femme ou encore la scène finale…
Kirk Douglas incarne avec force et charisme l’égoïsme de cet homme antipathique et arriviste mais en nous faisant aussi comprendre ses motivations, il livre l’une de ses meilleurs compositions. En face de lui, Jan Sterling, Robert Arthur dans le rôle de l’assistant/photographe ou encore Ray Teal dans celui du sheriff, sont impeccable.
Ce n’est ni le premier, ni le dernier chef d’œuvre de Billy Wilder mais surement son film le plus sombre et le plus noir. Il traite intelligemment et efficacement les thèmes qu’il aborde et est servi par un grand Kirk Douglas. On notera aussi qu’il s’en prendra au monde journalistique un peu moins de 30 ans après « Ace in the Hole » dans « Speciale Première » avec Jack Lemmon et Walter Matthau mais sur un ton bien plus léger et humoristique (mais quand même réussi !).
Pour ma part, c’était mon dernier Billy Wilder qu’il me restait à voir et je ne suis pas déçu en terminant par celui-là. Et je voulais tout simplement die un simple merci à celui qui m’aura offert de nombreuses expériences cinéma marquantes et qui est à ce jour l’un voire mon cinéaste fétiche, je prendrais toujours autant de plaisir à revoir ses chefs d’œuvres (Boulevard du Crépuscule, La Garconnière…), ses très bons voire excellents films que je trouve sous-évalué (Stalag 17, Fedora, Avanti…) ou donner une seconde chance à ceux qui m’ont (un peu) déçu (Sept ans de réflexions et Irma La douce). Merci.