Barbet Schröder est un grand du cinéma et s'est essayé là avec succès à un genre dangereux et casse gueule : filmer en Colombie sur un thème que d'aucuns trouveraient scabreux : une véritable histoire d'amour entre un écrivain quinquagénaire, désabusé et cynique et un adolescent rencontré dans un bordel de Medellin.
Vu en salle à sa sortie, la pellicule m'avait déconcerté par sa violence, par le désespoir profond de l'écrivain, par cette idylle improbable au milieu de la mort. Et paradoxalement par un certain humour noir qui permet aux populations de tenir.
On pourrait résumer : amour, violence, et Bonne Vierge. Nombreux paradoxes. Ce n'est pas le pédéraste qui tombe sous le charme de l'ado, mais l'inverse. Vallejo, l'écrivain, est trop cassé pour s'avouer son attachement à Alexis. La relation pédérastique n'est en aucun cas teinté de voyeurisme. On sait que Fernando et Alexis ont couché ensemble, on les voit au lit... au dessus de la ceinture, pas de quoi offenser la saine morale de notre siècle. Cette relation est montrée de façon toute naturelle. Ce qui l'est moins est la mutation des personnages, l'apprivoisement entre deux êtres que tout devrait séparer, culture, réaction face à la vie, violence, âge. Et la mayonnaise prend dans Medellin meurtrie et pourtant vivante.
Quand Fernando avoue enfin, que les projets se construisent, que les deux amis-amants cassent avec délectation du sucre sur le dos des habitants de leur prochain exil (espagnols, français en prennent pour leur grade), là où on s'y attend le moins, Alexis tombe sous les balles des tueurs, faisant rempart de son corps. Là, j'ai failli hurler de désespoir aussi. Et Fernando se retrouve "orphelin", cassé. Les scènes oniriques, sans mélodrame, sont un sommet. La seconde partie semble un remake en accéléré de la première, une course de plus en plus folle. Fernando, qui voulait mourir, doit vivre, et çà lui est insupportable.
Alexis et Wilmar seront passés comme deux météores, purs et virginaux.