« Shining » est le tout premier film de Stanley Kubrick que j’ai visionné il y a plusieurs mois, j’ai eu la chance de le voir en version intégrale mais, étrangement je n’avais pas du tout été transporté ou séduit par cette adaptation du Best-Seller de Stephen King car, je commençais tout juste à m’intéresser au 7ème art et la première fois l’univers du film me paraissait beaucoup trop floue et maladroite pour que je puisse réellement faire une critique ou donner une note quelconque au premier long-métrage du mystérieux et étrange maître de la mise en scène et de la réalisation qu’était le réalisateur de ce film, de plus j’avais trouvé que les personnages de Wendy et Danny n’avaient pas bénéficié d’un bon développement, surtout pour Wendy Torrance que je trouvais insupportable, le fait est qu’elle m’était paru aussi intéressant qu’un bout de bois, et le bout de bois en question on s’en fiche pas mal.
Plusieurs films résultent d’une adaptation d’un roman ou d’une œuvre littéraire, alors je me suis décidé à revoir ce film après avoir lu l’œuvre de Stephen King, avec la version cinéma cette fois-ci, et j’ai vraiment adoré, bien qu’il y ait beaucoup de détails du livre qui ait été évincés dans l’histoire, je reviendrais un peu plus bas sur ce fait ainsi que sur les détails du livre (que je vous conseille de lire si vous aimez les romans de fantastique et d’horreur, croyez moi c’est un super livre et l’histoire est plus ingénieuse et fascinante que son adaptation au cinéma).
Kubrick a donné vie à un nouveau genre du film d’épouvante qui est appelé le film d’horreur psychologique car ce film ne cherche pas à faire sursauter en continue ou à faire dans le gore ou bien à mettre en scène des morts spécialement spectaculaire comme un slasher movie, il se concentre sur notre état mental et notre ressenti intérieur en voulant donner une sensation d’angoisse et de mal-être, ce qui fonctionne à merveille dès l’introduction avec la composition originale de Wendy Carlos et Rachel Elkind. Stanley Kubrick avait l’habitude, jusqu’à ce film de ne prendre que des musiques déjà composées dans ses réalisations, surtout de la musique classique comme la neuvième symphonie de Beethoven dans « Orange Mécanique », mais ce film apporte une grande nouveauté avec une composition musicale dérangeante et glauque dès les crédits d’ouverture grâce aux sons des trompettes jouant sur la répétition et des notes lourdes et prestant, aidés par une image jouant sur la lumière et l’environnement filmé depuis un hélicoptère filmant la forêt, la rivière, les montagnes le tout sur un fond sonore oppressant pour rendre l’environnement typiquement menaçant. La musique arrive à être pesante et affolante durant les scènes les plus glauques, surtout
lors du grand Twist final avec la course poursuite dans le labyrinthe entre Danny et Jack sans oublier les visions fantomatiques et tordus.
Puisqu’on parle des personnages, commençons par le meilleur d’entre tous, interprété par la légende vivante des comédiens du cinéma, la crème des grands interprètes de psychopathe, j’ais nommé : Jack Nicholson, ou le Joker du cinéma comme on peut l’appeler depuis son interprétation du Joker dans le Batman de Tim Burton. Il sait être naturel et simple lorsqu’il n’est encore que le père de famille autrefois ivrogne, un écrivain raté et un ancien enseignant de grande école, et encore je n’ais dévoilé que les informations de base du bouquin. Mais lorsque
la folie s’empare de lui et qu’il discute avec les fantômes de l’hôtel notamment Grady (dont le vrai prénom est Charles, et non pas Delbert),
il devient tellement flippant mais aussi tellement fun à la fois, et ses expressions faciales ainsi que ses interprétations de dingue,
surtout lorsqu’il se fout de la gueule de Wendy lors de leur discussion dans le grand salon,
sont à la fois cultes, hilarantes et flippantes à la foi, et comment oublier
son improvisation lorsqu’il s’attaque à coup de hache à Wendy à l’entrée de la salle de bain ou il coince sa tête entre deux morceaux de bois de la porte bousillé et sort son fameux « Coucou chérie », ou bien « Here’s Johnny » pour les anglophiles, certains auront reconnus le clin d’œil à ce passage
. Est-ce que j’ais besoin de faire un long éloge sur Nicholson, on sait tous à quel point il est excellent. On y croit à tel point qu’on a l’impression qu’il va sortir de l’écran pour nous violer avec un bambou trempé dans du curry indien bien épicé... oui, j’adore faire des comparaisons tordu.
Par contre, si je dois bien reconnaître un énorme défaut à ce film qui gênera beaucoup plus ceux qui n’ont pas lu le livre que ceux qui le connaissent, c’est le personnage de Wendy Torrance. Autant l’actrice était bonne, autant le personnage version Kubrick était une bécasse insupportable et pleurnicheuse qui ne voyait pas plus loin que le bout de sa mèche noire et la version intégrale ne donne même pas le soin d’approfondir plus ce personnage, alors que dans l’œuvre de l’auteur Stephen King, elle avait une personnalité beaucoup plus évoluée et on la pardonnait facilement d’être niaise. D’ailleurs ça me donne envie de parler d’un gros défaut que j’expliquerais un peu plus bas. Ensuite, nous avons Danny Torrance joué par Danny Lloyd, ceux qui ont lu le bouquin n’auront aucun problème avec lui, surtout que le petit comédien s’en était très bien sorti, mais là encore on n’a pas suffisamment d’information sur Danny
si ce n’est qu’il a le Shining, ou Don comme il est dit dans le livre.
Je comprends qu’un film ait besoin de prendre des libertés pour avoir du succès, ça a marché avec la trilogie du Seigneur des anneaux et avec Jurassic Park, et là avec Shining si ça marche plus que très bien d’un côté, de l’autre : je me mets à la place de Stephen King, il avait été mécontent de voir cette version même si il considère le film comme excellent en tant que spectateur. Beaucoup trop d’éléments sont écartés dans cette adaptation :
la chaudière, l’alcoolisme de Jack qui était le point central du livre, les parents de Wendy et Jack ou encore leur passé qui sont volontairement écarté,
sans oublier les nombreuses modifications scénaristiques apportés par rapport au bouquin afin de rendre l’univers plus vague et nébuleux pour le spectateur, ce qui explique que la première fois je n’avais pas du tout accroché à l’univers du film et que je ne pouvais pas le considérer plus que comme un bon film.
Mais maintenant, en après avoir lu le livre et revu le film une seconde fois dans sa version cinéma, mon point de vue est totalement différent, je vois ce film comme un vrai chef d’œuvre malgré tout ses défauts, car entre-temps Kubrick a apporté ses touches personnelles pour donner à ce film une atmosphère lourde et affolante :
le labyrinthe en remplacement des buis ainsi que la course poursuite final à l’intérieur en plein hiver est tellement terrorisante par la force de sa musique et l’interprétation des acteurs qu’il en devient stressant,
et ne parlons pas de l’ascenseur aux portes rouges d’où une montagne de sang dégoulinera. Et il a quand même au la brillante idée de conserver les éléments les plus importants du livre pour rendre ce film glauque :
l’homme au masque de cochon homosexuel, les visions au Colorado Bar, la vieille femme décoloré et violacée de la chambre 217… oui j’ais dis 217, et non pas 237, il y a eu une petite erreur de scénario sur ce point
. On peut reprocher ce qu’on veut quant aux modifications apportés par rapport aux livres, Stanley Kubrick a eu l’idée brillante de garder les éléments les plus marquants pour nous les retranscrire à l’écran.
En plus de ça, les plans fixes de la caméra sont utilisés intelligemment durant la plupart des scènes, et les reculs de la caméra sur tel ou tel acteurs ainsi que les champs/contre-champs sont parfaitement utilisé avec le reste des éléments qui font que ce film parvient à nous terrifier, mais en jouant plus sur le fantastique et la psychologie évolutive du père de famille lié à l’hôtel hanté qu’est l’Overlook, que sur le thème de l’alcoolisme sur lequel travaillait Stephen King.
« Shining » de Stanley Kubrick est, malgré ses énormes différences au niveau du scénario et de l’univers qui fait que je garde une préférence pour l’œuvre littéraire : un œuvre fascinante avec un univers conçu par le réalisateur qui a fait du livre de Stephen King sa propre réalisation en se contentant de reprendre uniquement les bases du livre, et les principaux éléments flagrants de l’histoire d’origine afin de faire de sa réalisation la grande référence du film d’horreur, bien que je préfère considérer ce film comme un film de Kubrick que comme un film d’horreur.