Quand la fiction rattrape la réalité… C’est exactement ce qui est arrivé à "Le collectionneur", pour le coup interdit dans l’état du Maryland pour cause de crimes de même nature au moment de la sortie. Brrr, quand on y pense, ça fait froid dans le dos de savoir que de tels crimes ne sont pas forcément inventés de toutes pièces. Malheureusement, "Le collectionneur" ne fait pas vraiment cet effet-là. Je veux dire froid dans le dos. Il y avait pourtant de quoi ! Pensez donc : un dérangé du ciboulot qui enlève des jeunes filles les unes après les autres
pour les séquestrer dans le seul but de se faire aimer
, ça craint ! Et je ne vous dis pas ce qu’il advient d’elles si jamais il n’obtient pas satisfaction… Encore faut-il (et là je parle d’un point de vue strictement psychologique) que cette satisfaction soit complète… Le fait est que le rôle principal semble taillé sur mesure pour Morgan Freeman après le mémorable "Seven". Hélas, même si l’immense charisme de l’acteur noir américain fait mouche d’entrée, on reste assez loin du résultat promis par l’affiche par sa petite phrase « Le nouveau grand rôle de l’acteur de "Seven" ». Bon le film n’est pas mauvais en soi, loin de là. Mais il n’est pas exceptionnel non plus. La faute en revient à une réalisation un peu trop conventionnelle, mais surtout à un scénario pas toujours écrit dans la finesse. En effet, sur ce dernier point, on voit le Docteur Alex Cross arriver très facilement à la conclusion que la police locale a affaire à un collectionneur, et cela rien qu’en observant quelques clichés photographiques. Mais au moins, ça confirme bien le titre choisi pour la version française, un titre que je trouve malheureux dans le sens qu’il spoile plus ou moins le principal intérêt de ce thriller. Ma foi, si on avait voulu attirer du monde en salles sans avoir recours à une coûteuse promo médiatisée, on ne s’y serait pas pris autrement, en particulier quand on vient surfer sur l’immense succès de "Seven", sorti à peine deux ans plus tôt. Pour en revenir à l’écriture, le support était pourtant bien là, puisque le scénario a été adapté du roman de James Patterson qui lui-même s’est inspiré d’affiches portant les photos de jeunes étudiantes disparues placardées sur les campus de North Carolina University et de Duke, alors que son livre n'était encore qu'à l’état de manuscrit. Pour ce qui est de la réalisation, il y a du bon et du moins bon. Autant l’ambiance glauque côté criminel est assez réussie, autant elle aurait mérité d’être encore davantage développée disons (pour être plus précis) façon "Seven" puisque les producteurs ont ostensiblement lorgné vers ce film, ou façon "Le silence des agneaux". A l’inverse, la réalisation n’est pas suffisamment immersive du côté des gentils :outre les déductions un peu faciles, on ne ressent pas comme il se doit la difficulté d’une telle enquête. D’autant plus que celle-ci est émaillée de quelques surprises, lesquelles ont de quoi plonger les inspecteurs dans un océan d’incompréhension. Quant à l’interprétation des acteurs, elle n’est pas si mal que ça. Morgan Freeman, j’en ai déjà parlé. Ashley Judd… comment dire ? Elle ne m’a pas convaincu plus que ça et pourtant il semble qu’elle se soit donnée beaucoup de mal. Franchement, je l’ai trouvée mieux en kick-boxeuse qu’en personne lambda. Elle interprète malgré tout assez bien le choc psychologique mais se révèle être mentalement une vraie force de la nature, à commencer par la conférence de presse à laquelle elle donne une tournure que je qualifierai de curieuse. Quant aux seconds couteux que sont Tony Goldwyn et Cary Elwes, ils campent des personnages qui pourraient passer inaperçus dans la vie de tous les jours. On peut même dire qu’ils cachent bien leur jeu, et c’est surtout valable pour l’un d’entre eux, mais je ne vous dirai pas lequel pour ne pas trop en révéler. Notez que Tony Goldwyn sert un jeu à peu près similaire à celui adopté dans "Ghost". En conclusion, "Le collectionneur" est un bon film, mais avait le potentiel d’être bien meilleur et vous savez maintenant en quoi. Ce n’est certainement pas un chef-d’œuvre du genre, aussi ne soyez pas trop déçus et du même coup trop sévère. Malgré tout, il y a fort à parier que comme moi, vous serez pris par l’intrigue car vous aurez envie de toute façon de connaître le fin mot de l’histoire. Et tant pis si la toute fin sombre plus ou moins dans le déjà-vu. Ce qu’on retiendra surtout est le caractère sordide de cette affaire.