Vouloir "imiter une belle vie", pour cela se défaire du quotidien, de l'errance, de la perdition matérielle. C'est un mensonge: l'histoire est là, est écrite, on la connait, tout le monde la connait, Flaubert l'avait si bien racontée. Pourtant l'on en joue, l'on en s'amuse, à la fois les personnages qui s'en délectent, ne cessant de se rappeler entre eux les coïncidences entre l'histoire vécue et l'histoire racontée, mais la réalisation elle-même, il faudra que la demoiselle s'appelle Ema, qu'elle épouse un médecin, que le fameux "bal" ait lieu, qu'elle connaisse des amants qu'au fond elle n'aimera pas, enfin que la liberté se ressente prisonnière de la voix du narrateur, d'une muette qui "sait tout", puis que le suicide soit parodié, rejoué, tandis qu'il avait déjà été annoncé. Rarement un film n'aura aussi bien montré que ce qui fait l'artiste n'est pas l'histoire que qu'il raconte, mais la manière dont il la raconte, cette dernière demeurant comme un idéal, un rêve, que l'on rejoue sans cesse, pour le simple plaisir de l'entendre de nouveau, pour le simple plaisir de la redécouvrir; pour le grand plaisir de notre vie humaine.