L’éternelle histoire américaine provient de la Bible. Attachés au schématisme du manichéisme, les films américains de peu d’ambition se plaisent à recycler la sempiternelle lutte entre le Bien et le Mal. «Guilty as sin» (USA, 1993) de Sidney Lumet adopte le point de vue d’une jeune avocate ambitieuse, Jennifer Haines. Prête à défendre une affaire importante, elle décide de défendre un homme soupçonné d’avoir tué sa femme. La jeune avocate innocente, blonde aux yeux bleus, Vierge immaculée moderne, soutient un homme démoniaque. Les personnages, conçus à gros traits, sont les incarnations d’un dogme manichéen. De la part d’un cinéaste aussi peu enclin au dogmatisme de la réalité, «Guilty as sin» apparaît presque comme un désaccord. Fausse note criarde dans l’œuvre de son auteur, le film atteint le sommet de son ridicule dans l’une des séquences finales, lorsque révélant son entière malfaisance, l’accusé décide de faire passer son avocate à travers la balustrade. Retournement de situation, afin de satisfaire le happy ending, l’avocate s’en sort vivante. La mention du péché dans le titre traduit la sur-influence de la Bible dans l’intrigue. Lumet est un auteur inégal, réalisant près d’un film par an pour le cinéma plus quelques autres pour la télévision. La fin des années 80 et le début des années 90 sont pour lui une période difficile dans son œuvre. Reposant sur la contre-culture, les premiers films de Lumet entendaient prouver (avec toute la charge propédeutique que cela implique) que le système judiciaire tel qu’il est appliqué aux Etats-Unis dans les années 70 était caduc. Dans les années 90, le thème reste le même alors que le sujet (le système judiciaire) est différent. Mais «Guilty as sin» n’a pas pour ambition de dresser un constat réaliste, il est lourd de sens et aspire à définir de façon conceptuelle le rôle d’avocat. L’avocat est un ange au service du diable des hommes. La défense d’une telle idée en passe par trop de niaiserie.