Cette histoire bien noire, bien tragique d’une paysanne au parcours tumultueux et triste peut faire peur…
Le film dure 3 bonnes heures !
Cette chute, ce replis dans le malheur agrémenté (si je puis dire) d’une sombre critique de la société victorienne corsetée, soumise à l’apparence, enjeux des commérages fait froid dans le dos…
Surtout si l’on songe que ce n’est qu’en apparence que les choses ont changées…
Soyez droit, honnête, tolérant et franc du collier dans une communauté provinciale…
Vous ne tarderez pas à le constater !
L’intolérance, le racisme, la servilité face aux puissants et aux possédants, les jugements hâtifs, la connerie tape à l’œil (gros 4X4, chasses privées, grenouillages en eau bénite, indifférence à la souffrance animale, etc, etc…) sont toujours à l’œuvre dans les cerveaux rigidifiés contemporains.
POURTANT, ICI, AVEC « TESS », POLANSKI NOUS SERT L’UN DE SES PLUS GRANDS FILM…
L’ayant que modérément apprécié à sa sortie, sur le conseil d’une amie je me suis replongé dans cette noire épopée paysanne…
Est-ce l’âge ? Une meilleure compréhension du septième art ? Toujours est-il que Tess m’apparaît aujourd’hui comme un CHEF-D’OEUVRE…
Pourquoi ? L’ambiance mon cher ! La trajectoire noire et désespérée depuis la pauvreté insouciante juvénile jusqu’au dénouement tragique, désenchanté, inapaisé…
Je lis que le bouquin de Thomas Hardy était sur la table de nuit de Sharon Stone lorsque celle-ci fut assassinée… Polanski dédie son film à Sharon. A méditer !
Le réalisateur livre là un film d’époque en apparence fort éloignée du reste de sa production…
Elle s’inscrit en réalité dans la vision noire de l’humanité qui gouverne l’œuvre du rescapé du ghetto de Cracovie…
L’ambiance sourd dans l’art collectif du cinéma des choix techniques…
Tess est un sommet pour ce qui concerne le montage scénaristique, la photographie, les lumières et la musique.
Commençons par la musique servie par un Philippe Sarde au sommet de son art. Toujours bien placée, romantique à souhait, mélodique elle sert de jalon à cette épopée compliquée. Elle n’envahit jamais l’image et surtout ne la double jamais…
La qualité d’image de Tess ne se dément jamais tout au long du film… Elle est simplement sublime ! TESS EST GENIAL SUR LE PLAN STRICTEMENT PHOTOGRAPHIQUE !
On doit ce travail magnifique à Ghilain Cloquet qui signa, entre autres, également la photographie du « Trou » de Jacques Becker, de « Mouchette » de Bresson, d « Un soir, un train » de Delvaux. Il recevra l’Oscar et le Cesar de la meilleure photographie pour Tess… C’est dire !
L’alchimie cadrage et lumière fonctionne à merveille… Saisie des flots de lumière changeante sur les blés, les pâtures, au travers des bois… Rendu des ciels mouvants… Rudesse des ombres des hommes aux champs et à la tache… Clairs-obscurs percés des raies coupantes du soleil investissant les intérieurs où l’on chuchotte… On pense à Van Gogh, à Manet, à Renoir, à Vermeer..
Enfin la réalisation de Roman Polanski servi par des acteurs magnifique…Et notamment Nastassja Kinski toute de grâce et de naturel qui incarne l’entêtée Tess d'Urberville, malheureuse qui sera offerte en sacrifice au dieu Soleil au cœur des mégalithes tournoyants de Stonehenge…
A VOIR ABSOLUMENT ! CULTE