Longtemps resté en voie de garage à cause de la faillite d'orion, société de production du film, THE DARK HALF sera très attendu par les admirateurs de King. Ce dernier ayant déjà collaboré avec Georges Romero sur le réussi et détonnant "Creepshow". Cette nouvelle rencontre entre les deux maîtres de l'horreur donnait l'eau à la bouche, laissait espérer beaucoup. D'autant plus que King avait été dithyrambique: "THE DARK HALF est toujours invisible et c'est vraiment honteux, car il s'agit d'un film superbe. Peut-être l'un des meilleurs de Romero, si ce n'est le meilleur". La production ayant imposé au réalisateur des rectifications sur son film, King parlait-il de la version initiale ou bien de celle qui fût finalement présenté aux spectateurs?
THE DARK HALF est projeté sur les écrans durant l'année 93. Si le film ne passe pas inaperçu, bénéficiant d'une bonne campagne de publicité; l'accueil, à la fois du grand public et des critiques est plutôt mitigé, voir négatif. Où est passé le cinéaste du mythique "La nuit des morts-vivants" se demande-t'on?
Il est vrai que l'on avait connu un Romero plus audacieux. Les scènes de meurtres sont étonnament timides, manquent de ce quelque chose de choquant qui avait fait le triomphe de sa trilogie des zombies. D'autant plus que le livre de King contient de nombreux effets gore, de ce fait, après avoir lu le bouquin, le film parait presque édulcoloré. Le bouquin comporterait des effets sanglants parfois inutiles, selon certaines critiques.
D'autre part, le déroulement du film donne un peu l'impression par moments d'être réduit à une intrigue policière durant laquelle se succèdent des crimes. Romero reconnaîtra lui-même cet aspect en avouant: "Avec le recul, je n'aime pas trop le côté dents de scie du film. Si j'avais pu modifier des choses je l'aurais fait..."
Pourtant, THE DARK HALF possède des qualités que peu ont pris le temps de souligner, ayant vite descendu le film. THE DARK HALF est à l'origine un passinnant et brillant roman de King, que Romero apprécie, et son adaptation respecte le livre. Il restitue plutôt bien l'atmosphère kingienne. Et il est fort probable aussi qu'il ait envisagé la réalisation de THE DARK HALF sous un angle différent par rapport à ses précédents films, en s'attachant ici davantage à la psychologie des personnages; ainsi qu'à cette légende, qui confère une dimension poétique à l'oeuvre, des moineaux qui guideraient les âmes des défunts vers l'au-delà.
Par ailleurs, Romero se sera inspiré d'un grand classique du genre, "Les oiseaux"d' Alfred Hitchkock, lors d'un début très inquiétant, et un dénouement impressionnant.
La part obscure de l'être humain, la schizophrénie, le conflit intérieur bien-mal restant les thèmes majeurs du film, comme ils le sont pour le livre; Timothy Hutton est remarquable dans l'inteprétation périlleuse d'un double-rôle, incarnant à la fois Stark, l'écrivain gore ressucité, et Beaumont, le bon père de famille.
Ainsi, si au final, THE DARK HALF déçoit dans la mesure où il n'est pas le chef-d'oeuvre qu'il aurait peut-être pu être, il n'en demeure pas moins une adaptation intéressante de Stephen King.