Devenu culte grâce à la célèbre scène de torture à base d’instruments de dentiste et de "c’est sans danger ?" (scène traumatisante s’il en est), "Marathon Man" ne m’est pourtant pas apparu comme un chef d’œuvre inattaquable. Côté bons points, "Marathon Man" restera, évidemment, comme une référence de film parano typique des 70’s puisque que le héros doit se méfier de tout le monde…
à juste titre d’ailleurs puisqu’il n’y a pas un seul personnage qui ne mentent pas dans cette histoire
. Le scénario gentiment alambiqué, où se mêlent services secrets et anciens nazis dans une société pas tout à fait remise de la Seconde Guerre Mondiale, ainsi que la mise en scène tout en tension qui orchestre certaines séquences (voir les scènes à Paris, notamment) offrent une véritable valeur ajoutée au film. Un soin tout particulier a, également, été apporté aux personnages, présentés avec des nuances appréciables. Ainsi, le héros n’est pas un gentil candide emporté dans une tourmente qui le dépasse mais un névrosé traumatisé par le suicide de son père. Le grand méchant de l’histoire est une sorte de Dr Mengele mais laisse apparaître des failles intéressantes quand il évoque l’Allemagne nazie (un "rêve" dans lequel il croyait vraiment) ainsi qu’une facette franchement pathétique dans ses ambitions très matérialistes. Quant au grand frère, son flegme parvient à transcender le personnage et à le rendre immédiatement sympathique malgré sa profession et ses agissements. L’interprétation des acteurs est, également, pour beaucoup dans le succès du film, de Laurence Olivier qui s’est fait une gueule invraisemblable à Roy Scheider en passant par Marthe Keller et William Devane. Quant à Dustin Hoffman, il est, certes, très bien mais, une fois n’est pas coutume, j’ai trouvé son interprétation, très actor’s studio, franchement disproportionnée au vu du rôle (qui reste assez "normal")… au point d’être parfois un peu ridicule quand
il sur-réagit face à son frère mourant
ou qu’il court les bras en l’air pour échapper à ses agresseurs. Je me demande, d’ailleurs, encore, l’intérêt d’avoir fait de son personnage un coureur de marathon… si ce n’est pour justifier un peu grossièrement son endurance lors de ces scènes de poursuites ! Ce n’est pas le seul défaut du film, qui porte les stigmates de son temps. On n’échappe pas, dès lors, aux seconds rôles communautaires caricaturaux, que ce soit les voisins blacks, qui sont forcément des connards arrogants et voleurs à leurs heures perdues, les Allemands qui sont tous d’anciens nazis ou les Juifs qui sont soit des rescapés des camps de la mort, soit des diamantaires ! On a, également, droit à des invraisemblances plus formels (ah l’immense lame de couteau cachée de ce brave Dr Szell), à un rythme pas toujours très travaillé (certaines séquences, comme la poursuite en voiture du début ou la reconnaissance du Nazi par une ancienne déportée, s’étirent beaucoup trop longtemps) et à des incohérences scénaristiques surprenantes
(comment un ancien dignitaire nazi, même déguisé, peut-il avoir l’idée de faire évaluer ses diamants dans le quartier juif de New-York ?)
. Ces défauts et ce rythme parfois trop lent m’ont empêché de m’emballer totalement pour le film, même s’il réserve de véritables rebondissements
(le meurtre du frère, la trahison de la petite amie…)
. "Marathon Man" reste un bon film mais qui n’a pas forcément su bien vieillir.