Polar assez méconnu que les cinéphiles (re)découvrent actuellement, « La Ronde du crime » est de ces films qui, sous ses apparences assez classiques, notamment dans son récit, cachent en réalité quelques vraies richesses. Si le postulat de départ touchant à un trafic d'héroïne n'est pas spécialement original, certains personnages, scènes et dialogues le sont nettement plus. Passons la partie policière, moyennement intéressante et que l'on aurait (presque) pu supprimer du récit, pour se concentrer sur celle « criminelle », où les répliques cinglantes et acides se multiplient pour parvenir à un résultat parfois étonnant, notamment dans la surprenante relation qu'entretiennent Eli Wallach et Robert Keith, une forme de complicité faisant ensuite place à une réelle violence, voire une certaine cruauté, les idées originales et les scènes marquantes se multipliant au fil des minutes, le sens du découpage et la maîtrise de Don Siegel ne faisant aucun doute. Pour en revenir quelques instants à Wallach, son personnage de tueur sociopathe est vraiment l'un des plus marquants qu'ils m'aient été permis de voir dans le genre, avis que partage le grand James Ellroy : merci, maître. Le passage avec
la rencontre du chef des trafiquants
est à ce titre un remarquable moment de cinéma, d'une tension et d'un sadisme rarement égalé. Avec en prime une course-poursuite presque pionnière, non sans quelques transparences, mais vraiment bien faite et étonnamment immersive pour l'époque. Le final n'est en revanche pas vraiment à la hauteur, mais au vu des qualités évoquées précédemment, on pardonnera aisément les quelques aspects plus convenus de ce thriller de fort bonne facture. Une réussite.