J'ai beau ne pas trop être fan de la vision de Batman de Tim Burton, ce film reste pour moi très intéressant. D'abord je trouve la direction artistique encore plus aboutie que dans le précédent opus : un Gotham City gothique, burtonienne, glaçante et mise magnifiquement en scène (j'adore les passages avec la neige). Les costumes sont très réussis, même si on pourrait reprocher à celui de Batman d'avoir vieilli. Maintenant en ce qui concerne le film, on peut trouver certains passages ridicules
(Selina Kyle maîtrisant subitement l'acrobatie et les techniques de combat, le Pingouin qui pirate la Batmobile, les enregistrements de Batman sortis de presque nulle part...)
mais pour moi il faut plus voir ce film pour ses personnages que pour son scénario. Burton capte ici l'essence-même du cinéma fantastique avec Batman Returns car il y représente à divers niveaux la monstruosité, et même la bestialité ; Max Shreck (Christopher Walken) est le politicien pourri que la société toute aussi pourrie adule, amenant le film à une critique politique et écologique de la société (là où le premier film Batman n'avait aucun réel propos), le Penguin (Danny DeVito) est l'enfant renié ayant trouvé refuge chez les manchots
qui va chercher vengeance mais va vite se faire manipuler par Max et tomber complètement dans son côté animal (lorsqu'il veut tuer des bébés)
, Catwoman (Michelle Pfeiffer) était une femme innocente et ratée,
tuée par son patron, qui va renaître (grâce aux chats) et chercher à se venger de cette société qui l'a tuée
(toute la subtilité du personnage réside dans le fait qu'elle hésite entre son côté humain et animal, car de son côté
Selina Kyle va tomber amoureuse de Bruce Wayne
). Batman, quand à lui, a trouvé cet équilibre et ne sert ici que de point de repère pour les autres personnages (c'est pour cette raison qu'il n'est pas très présent à l'écran, du moins c'est la vision que Burton a voulu). On peut constater cette sorte de gradation animale sur l'affiche du film : au bas de l'image, le Penguin, qui va sombrer totalement dans son côté bestial, juste au-dessus Catwoman, vengeresse n'étant toutefois pas dépourvue d'amour, et enfin Batman, le héros droit, parfois presque boy-scout, n'ayant en aucun cas sombré dans la monstruosité. Ces 4 personnages vont à la fois se contrarier et se compléter, entrant ainsi dans une sorte de cercle vicieux :
Le Penguin et Catwoman vont s'associer pour se venger de Max, mais vont aussi s'associer contre Batman en voulant le faire comme criminel aux yeux de Gotham (réel méchant du film, représenté par Max)
. D'un autre côté, Batman et Catwoman éprouvent une attirance mutuelle l'un pour l'autre, entre sensualité et admiration. Si l'on aborde le long-métrage sous cet angle, il devient beaucoup plus travaillé en temps qu’œuvre de cinéma. En temps que fan de Batman, je trouve ce film moyen (Batman qui tue ses ennemis, ce qui va d'ailleurs à l'encontre de son image de héros droit) mais c'est un Burton tout à fait abouti (là où le premier film hésitait trop entre l'univers de Batman et la vision d'auteur de Burton). D'ailleurs, un plan représente parfaitement cet esprit : lorsque Catwoman lèche son propre costume, tel un chat se toilettant. Ce que personnellement je rechercherai dans un film Batman est un souci de réalisme (lécher sa panoplie n'a absolument aucun intérêt) mais par ce plan, Burton montre de façon très caricaturale la bestialité de Selina Kyle. Il faut prendre ces personnages comme des allégories vivantes pour apprécier pleinement Batman Returns. Pour les amateurs de contes fantastiques et gothiques, au ton plutôt sombre et pessimiste, et au traitement des personnages analysant la dualité humanité/bestialité.