Ce qui m'a souvent marqué dans l'univers d'Hayao Miyazaki, c'est sa capacité à jouer sur plusieurs tableaux différents, à créer un monde complexe qu'il peut rendre, à la fois, lyrique, drôle, sauvage, émouvant, intelligent ou encore d'une grande richesse visuelle.
Princesse Mononoké est un parfait représentant de cela, il lui faut peu de temps pour mettre en place son univers ainsi que de rendre le protagoniste attachant, tissant autour de lui des liens avec des personnages pouvant être complexes, attachants ou encore intrigants, et ce, que ce soit des humains ou non. On se retrouve plongé dans cette aventure nous emmenant au cœur d'une forêt magique et mystérieuse, où l'on ressent toute la force de la mythologie créée par Miyazaki, avec autant d'intelligence que de passion et finesse.
C'est dans le manga Mononoke Hime, écrit par Miyazaki lui-même en 1980, qu'il va trouver son inspiration, il sera un immense succès, notamment au Japon, et sera la première pierre à une reconnaissance internationale, confirmée quelques années plus tard par Le Voyage de Chihiro. Rappelant sur plusieurs points Nausicaa, notamment dans les thématiques et la vision de l'humain, Princesse Mononoké a tout pour être l'oeuvre ultime de Miyazaki, un film qu'il a longtemps pensé, réunissant ses réflexions, sa vision de la vie ou les figures qui lui sont propres, et ce avec une créativité et imagination qui n'ont pas de limite.
Tout ici semble parfait, que ce soit dans l'évolution des personnages, le rythme, la place laissée à la magie ou encore l'ambiance, parfois sombre, souvent aventureuse, fascinante aussi et rendant le spectateur émerveillé. Il parvient aussi à faire passer des messages simples mais puissants sans que jamais cela ne nuise au récit, c'est avant tout par le prisme des personnages qu'il va dénoncer le comportement humain ou encore la non prise de conscience de ceux-ci pour le respect et la sauvegarde de la nature, et ce que la Terre était avant que l'humain ne se l'approprie.
Ce qu'il y a de remarquable dans l'univers de Miyazaki, et ici en particulier, c'est la façon dont on se passionne très vite pour les personnages, on s'y attache, on peut les détester ou tout simplement être intrigué, mais ils ne laissent jamais indifférents. C'est un jeune prince maudit que l'on va aimer, ainsi que celle qu'il rencontrera dans la forêt, une princesse élevée par les loups, alors que face à eux se dresseront ceux voulant exploiter la Terre, et ce n'est jamais manichéen, ils sont tous soignés, avec des buts différents et des dilemmes intérieurs. Miyazaki n'en oublie pas non plus les rôles plus mineurs, sachant apporter une touche plus légère, à l'image des femmes au village des forges.
J'ai découvert assez tard l'univers d'Hayao Miyazaki et ce qui m'a mis très vite une claque, c'est l'aspect visuel, tout simplement magnifique et stimulant l'imagination du spectateur. Les dessins sont sublimes et inventifs, l'animation parfaite, et retranscrivant à merveille l'ambiance magique et complexe qui traverse l'oeuvre. Il y a une tension qui se dégage du récit, qui parvient à alterner les moments calmes et ceux d'opposition, et l'alchimie avec la poésie est parfaite, le tout étant sublimé par la somptueuse bande-originale de Joe Hisaishi.
L'histoire se déroule durant l'ère Japon médiéval, et Miyazaki parvient à sublimer ce contexte, ainsi qu'à le mêler à toute une passionnante mythologie, avec des guerriers, une princesse, les esprits, des bêtes intelligentes, les séduisantes figures du mal ou encore les démons industriels. Ce ne sont plus des personnages mais des mythes et symboles, et ils prennent place dans une magnifique suite de tableaux formant une épopée épique et bouleversante.
Hayao Miyazaki signe avec Princesse Mononoké une oeuvre d'art épique, bouleversante, sous tension ou encore passionnante, créant une véritable mythologie ainsi que des figures fortes, complexes et attachantes, rythmée par une partition lyrique et magnifique, ainsi qu'une créativité sans limite.