Je dois commencer par avouer ne pas connaître énormément l'œuvre d'Émile Zola. Cependant, ayant lu Germinal, je connais son roman le plus célèbre et m'autorise ainsi à parler de ce grand écrivain. La Vie d'Émile Zola commence par les débuts difficiles du romancier, ses petits boulots et son amitié avec le peintre Paul Cézanne. Le récit se permet des inexactitudes chronologiques, mais cela n'a pas grande importance. Dans cette première partie, Zola explore le monde qu'il décrira dans Les Rougon Macquart : la France humiliée par la défaite de 1870, les terribles conditions de vie des mineurs, la vie des prostituées (un des personnages lui inspire Nana), etc. Avec ses succès littéraires, Zola devient immensément riche. Mais ce n'était là que le prologue. L'histoire débute réellement avec un fait divers : un officier, Juif de surcroit, est accusé d'avoir trahi la France et est condamné au bagne après avoir été dégradé. Son nom : Alfred Dreyfus. Apparemment, il y a aucun lien entre cette histoire et Zola. Or, ce dernier, convaincu par la femme de Dreyfus de son innocence, mène un combat pour la vérité. Explorant tous les détails de l'affaire, depuis l'investigation menée par le commandant Picquart qui conduit au vrai coupable, Esterházy, le procès factice de ce dernier, le petit-bleu de Henry etc. jusqu'à sa mort mystérieuse en 1902 (soit quatre ans avant la réhabilitation de Dreyfus, autre liberté que prend le film), suggérée dès le début par l'omniprésence d'un poêle menaçant. Deux scènes magistrales mettent en valeur le jeu impressionnant de Paul Muni : la lecture de son article-bombe "J'accuse !" dans les locaux de l'Aurore de Clemenceau, et son procès pour diffamation, alors qu'il est hué par l'assemblée antidreyfusarde. Le film de William Dieterle ne raconte qu'une maigre partie de la vie d'Émile Zola, mais sa critique de l'antisémitisme omniprésent dans les années 30 en fait un film héroïque, à l'image de son personnage.